Etonnant et vraiment bien fouttu!
Au début de ma lecture, je m'attendais à un roman policier, voir un thriller, et au final "De bons voisins" est bien plus que cela. Bien sûr il y a la tentative de meurtre sur la jeune voisine, résidante du rez-de-chaussée de l'immeuble, son agonie pendant de longues heures et le suspens que cela entraine. Le tueur va-t-il revenir finir le boulot? La victime va-t-elle s'en sortir? Quelqu'un va-t-il l'aider?... Mais au final ce fait divers, basé sur une histoire vraie, n'est qu'un prétexte à dépeindre la vie de multiples personnages.
La tuerie présente dans la cour de l'immeuble n'est que le point central, l'axe autour duquel de nombreux personnages gravitent. Séparé par une fenêtre et quelques mètres de haut, chacun voit la scène, s'en afflige sans s'en soucier vraiment (tous persuadés que quelqu'un d'autre a appelé, appelle en ce moment ou appellera les secours) et continue de vivre sa vie. Ryan David Jahn utilise alors la scène de crime pour figer un instant de vie et présenter un microcosme de notre société contemporaine.
Tour à tour nous rentrons dans la vie du jeune homme appelé au Viêtnam et de sa mère souffrante, celle du voisin qui s'est construit une vie de famille virtuelle pour (se) cacher son homosexualité, celle d'un jeune couple mixte dans la crainte d'avoir percuté un enfant sur la route, celle d'un couple en bout de course pratiquant sa première expérience échangiste... Celle de la victime bien sûr, seule physiquement et psychologiquement, voyant ces regards aux fenêtres mais ne comprennant pas pourquoi personne ne réagit pour lui venir en aide. Enfin, nous suivons un flic borderline dans sa patrouille nocturne au coeur de New York. Tout ce beau monde se rejoindra à l'aube sur le parvis de la résidence et constatera, écoeuré des autres et d'eux-même, qu'une véritable boucherie s'est déroulé sous leurs fenêtres, dans l'indifférence générale.
Au final, il est difficile de dire ce qui fait le plus peur dans ce roman: le crime en lui même, la détresse de la victime, le désoeuvrement apparent des voisins, la police véreuse, la société actuelle, les problèmes existentiels des uns et des autres... "De bons voisins" est encore bien présent dans ma mémoire alors que je l'ai lu il y a plus de 2 mois. Connaissant ma mémoire de poisson rouge pour les romans, c'est gage de qualité!