De l'eau pour les éléphants par Plume
Je n'étais pas tellement tentée par ce roman dont j'ai pourtant lu tant de bien, par esprit de contrariété probablement...
C'est finalement mon baby challenge Littérature contemporaine LA qui aura eu raison de moi et pour mon plus grand plaisir !
Parce qu'indéniablement De l'eau pour les éléphants est un grand roman et pour tout un tas de raison que je vais tenter de détailler un peu.
Pour son traitement de la vieillesse et du souvenir déjà. Ce récit à la première personne est en fait un cheminement de la mémoire d'un vieil homme placé en hospice, on navigue entre ses souvenirs et sa cruelle réalité présente.
Avec à la fois réalisme et délicatesse Sara Gruen dresse le portrait de nos sociétés modernes où l'on vit vieux et pourtant mal ; à la fois isolé et sur-protégé dans des établissements spécialisés où la nourriture est sans sel, sans lait, sans gluten... et finalement sans saveur, où les personnels soignants se comportent bien trop souvent en nurses et infantilisent leurs patients...
Pour ce retour dans le passé ensuite, l'ambiance de ce temps perdu de la gloire du cirque ambulant qui hésite entre romantisme et burlesque parfois mais penche le plus souvent vers la rudesse et la cruauté, l'autre côté du décor.
Parce que derrière les charmes de la vie de saltimbanques ou de "tchécos" ; ces ouvriers corvéables à souhait venus de l'Est ; se cachent des drames humains, l'errance et la misère. Cet autre aspect qui n'est jamais mis en avant, dissimulé sous les costumes à paillettes et les odeurs de pop-corn, et au profit du spectacle, Sara Gruen nous le jette en pleine figure.
Le quatrième de couverture parle de "sordide", le mot est on ne plus juste et plus d'une fois on est horrifié, que ce soit pour les animaux ou les hommes dont on ne sait au final qui est le plus à plaindre.
Pour les personnages aussi, bien construits et réalistes. L'empathie est réelle qu'elle soit positive ou non, aucun ne laisse indifférent...
On se révolte souvent contre August ou Oncle Al, l'un pour sa folie l'autre pour sa froideur inhumaine. On apprend à apprécier Walter, malgré son sale caractère et aussi Camel et les autres, tous unis dans la dureté de la tâche et des conditions de vie.
Si on s'en tient là, ce roman serait juste insoutenable. Mais dans cette fange de malheur surgit Jacob et Marlène, un amour impossible et d'une pureté incroyable magnifié par ce contexte sordide.
Le duo évolue avec pour toile de fond leur amour commun pour les animaux, et en particulier Rosie l'éléphante vedette du cirque. Une touche plus que bienvenue d'espoir et de romantisme dans cette noirceur ambiante !
J'ai adoré, de manière évidente et sans réticence, ce roman m'a emmené loin tout en restant très proche.
Quelques jours après, la digestion faite je n'arrive toujours pas à lui trouver un défaut majeur ou un tout du moins un point négatif. Même sa fin, un peu naïve, reste dans le ton de cet amour du cirque et du rêve qu'il vend quoiqu'il en coûte.