Précepteur de Néron (avec apparemment peu de succès dans cette voie), Sénèque était un grand penseur adepte du stoïcisme. Dans ces deux textes "De la vie heureuse" et "De la tranquillité de l'âme", il s'attache à donner les conseils qui, selon cette philosophie, permettrait de mieux vivre.
J'aime d'ailleurs le fait que, attaqué sur son train de vie et sur ses difficultés à ne pas savoir appliquer à lui-même sa doctrine, il s'attelle à répondre à ses détracteurs en arguant que le philosophe est là pour montrer la voie idéale à suivre, non pas la sienne ! Il est à la recherche de la sagesse et du bonheur, mais n'en est pas le précurseur ni le gardien, encore moins le dépositaire. Cette défense quoique apparemment maladroite et signe d'un homme sur le repli me semble plutôt sage (justement) et mesurée.
La mesure est d'ailleurs ce qui caractérise en premier point le stoïcisme, ce qu'il convient de mettre en pratique, d'adopter pour vivre heureux comme le conseille Sénèque à son frère Gallion dans le premier écrit.
Il enjoint celui-ci à vivre en accord avec la nature (au sens plus large que le sens "écologique" qu'elle revêt principalement aujourd'hui), à pratiquer la vertu plus que la recherche du plaisir (thèse qui s'accompagne assez longuement d'une critique de la philosophie d’Épicure) et à bien séparer ces deux notions.
Il s'attarde aussi sur la richesse et l'importance que l'on doit ou non lui accorder. Sénèque se montre habile envers ses détracteurs avec une réponse claire et cohérente :
[...] chez moi les richesses ont une place ; chez vous elles occupent la première ; enfin elles m'appartiennent, tandis que vous leur appartenez.
Dans le deuxième texte qui se veut un dialogue lors duquel Sénèque répond à un ami en proie aux tourments de l'âme et de la conscience ; le philosophe vante l'action bénéfique d'un engagement politique et social, un travail pour la société en quelque sorte ; il met en garde sur le choix de ses amis tout en reniant la misanthropie néfaste à l'épanouissement ; il revient à nouveau sur les dangers de l'esclavage des richesses sur l'homme ; et surtout il rappelle l'un des principaux éléments de la philosophie stoïque, à savoir le détachement quant au sort qu'il nous est réservé. Savoir accepter les épreuves de la vie sans s'en accabler plus que mesure.
Plus étonnant il finit par quelques conseils plus pratiques sur les bienfaits d'une ivresse ponctuelle ou sur le repos.
A travers ces deux dialogues (qui sont finalement des monologues à 99%) Sénèque explique clairement la philosophie basée sur le stoïcisme, qu'il juge la plus apte à apporter bonheur et tranquillité à l'âme humaine. Toujours être dans la mesure, dans la vertu, en accord avec le monde, une sagesse d'un autre temps qui peut apporter des réflexions intéressantes à l'homme moderne enclin à céder à toutes les passions.
Que l'on soit en accord ou non avec ces principes on ne peut que tirer des enseignements de ces pensées philosophiques qui seront suivies de celles de Marc Aurèle, adepte lui aussi du stoïcisme.