Le nouveau livre de Michel Onfray est copieux. Heureusement que les 675 pages sont en partie allégées par le fait qu'une centaine d'entre elles sont consacrées aux annexes (dont je conseille néanmoins la lecture). Il y a beaucoup de passages passionnants et beaucoup de pages pénibles à parcourir. La dissertation philosophique pure et dure, remplie de subtilités qui échapperont sans doute à la plupart des lecteurs (dont moi) rend certaines pages indigestes. de plus, le foisonnement des énumérations, citations, adjectifs, exemples, contre-exemples... souvent avec des répétitions, des redites, quelques fautes d'orthographe peut agacer même s'il contribue à soutenir les thèses de l'auteur. Il faut une culture philosophique considérable pour ne pas décrocher à plusieurs reprises et un dictionnaire bien épais pour comprendre tous les termes employés.
En gros et si j'ai bien compris, Onfray explique que toutes les idéologies qui ont prétendu faire le bonheur des hommes sont devenues des tyrannies épouvantables dès qu'elles sont parvenues à s'imposer. Elles oublient alors toutes leurs bonnes intentions pour se livrer au génocide de ceux qui n'y adhèrent pas. Tout y passe à commencer par le Christianisme. C'est une doctrine de l'amour du prochain et de la paix, prônée par une minorité opprimée et pacifiste tant qu'il n'existe qu'à l'état de secte. Une fois passée par les mains d'individus mal dans leur peau (Paul de Tarse) ou illuminés (Origène, Saint Augustin, etc.) qui la mettent au service d'un pouvoir politique corrompu (à commencer par celui du premier empereur romain chrétien, Constantin), cette religion cautionne les pires exactions. Il y a un échange de bons procédés. D'une part, le Christianisme tient les foules dans l'ignorance, la superstition et la soumission aux forts auxquels elle donne sa bénédiction. D'autre part, les dictateurs, tyrans, massacreurs offrent des privilèges exorbitants à l'Église. Les deux s'allient pour exterminer tous ceux qui ne marchent pas droit.
L'Islam suit un chemin un peu différent puisque les pouvoirs spirituel et temporel s'y confondent. le résultat est cependant le même.
Le Judaïsme a sans doute suivi la même voie lors de la conquête de la Terre Promise.
Les philosophes des Lumières (Rousseau en tête), en privilégiant les idées sur les faits, ont en quelque sorte donné un permis de massacrer aux Révolutionnaires de 1789 puisqu'ils agissaient au nom d'un idéal.
Les Marxistes, avec leur dictature du prolétariat, ont permis l'horreur stalinienne.
Tout cela a conduit aux fascismes italiens et allemands qui ont mangé à tous les râteliers philosophiques pour perpétrer les actes les plus immondes.
Plus récemment, le politiquement correct et l'ingérence des pays qui estiment que leur modèle de société DOIT s'imposer partout ont favorisé le triomphe de l'intégrisme islamique.
C'est un condensé à l'extrême, mais il est difficile de tout évoquer. Soulignons seulement que le Christianisme, De Saint-Paul à Pie XII, est particulièrement mis en accusation pour ses contradictions constantes, son antisémitisme fondateur et son obscurantisme militant.
Pour Onfray, il me semble que la meilleure forme de société serait une espèce d'Épicurisme : faisons-nous du bien, essayons de ne pas faire de mal autour de nous et restons-en là. Selon le principe du rasoir d'Occam : « Ne multiplions pas les entités (Dieu par exemple) sans nécessité. »
Au passage tous les « grands personnages » de l'Histoire ou presque nous sont présentés comme des fripouilles et leur belle image n'est que le produit d'une hagiographie bien conduite.
La conclusion serait que la société judéo-chrétienne est maintenant en phase terminale et que le modèle de société islamique, dans lequel la vie terrestre compte moins que le paradis promis post-mortem, lui succédera.
On en sort un peu convaincu, certainement plus savant, mais parfois incrédule. En effet, on y découvre des « scoops » renversants que l'on n'a pas le courage de vérifier dans l'abondante bibliographie. Deux exemples qui m'ont fait douter (parmi quelques dizaines d'autres) : l'allusion à Jésus dans Flavius Josèphe est un rajout des moines copistes du texte original (!), le Judaïsme orthodoxe (actuel) encourage la polygamie pour des raisons démographiques (!!).
Bref, lisez ce livre en prenant des notes (ce que je n'ai pas fait) afin d'en tirer la substantifique moelle et d'en vérifier à l'occasion les bouleversantes révélations.