J'ai rapidement fait le test autour de moi : si vous évoquez "Délivrance", c'est l'adaptation cinématographique de 1972 signée John Boorman qui vient immédiatement à l'esprit des gens, curieux ensuite de découvrir qu'avant le film - qui a marqué toute une génération -, il y a à la base un roman choc qui a lui aussi fait parler de lui.
"Délivrance" est un roman court d'une rare intensité et dont le personnage principal est une rivière sauvage que quatre potes en mal d'aventures décident, sous l'impulsion du plus téméraire d'entre eux, véritable survivaliste rompu à tous les sports de plein air, de chevaucher en canoé. Voilà notre bande de citadins bringuebalés dans leurs 4x4, en route pour dompter cette rivière de Géorgie qui s'écoule à travers une terre vierge et hostile, peuplée de quelques autochtones patibulaires. Mais la virée bivouac du week-end va virer au cauchemar en seulement quelques coups de pagaie...
Le roman est construit exactement comme est configurée ladite rivière ; c'est là que réside le grand talent de James Dickey. D'abord calme, elle se fait soudain tumultueuse au détour d'un rapide puis meurtrière à l'approche d'une chute. Le roman suit son cours, en quelque sorte.
Ce thriller est un huis-clos à ciel ouvert, les descriptions de la nature sont à couper le souffle, on se croit embarqué à bord d'un des canoés. Du pur nature-writing avant l'heure. La psychologie des rares personnages est sondée à fond, leurs relations évoluent avec finesse et irrémédiabilité.
Ce roman est une prouesse littéraire mêlant talent stylistique, tension psychologie, action qui va jusqu'à la violence criminelle, narration bien rythmée et ambiance réaliste. Jusqu'à la dernière ligne, j'ai retenu mon souffle.
Il ne me reste plus qu'à visionner l'adaptation ciné et juger de sa fidélité.