Un connard charismatique et endiablé
Enfin un roman, un vrai qui prend aux tripes, qui colle à la sueur de ta peau et qui transpire dans tes draps ! Ouais, je dis enfin mais ça fait déjà un ptit bout de temps que je traîne du côté de L.A. en compagnie de Charles le déglingué ou sur la route folle aux côtés de Jack...
Mais celui-ci avait une saveur particulière, une épice différente peut-être qui goûte la poussière et le soleil, qui goûte la jeunesse et surement même la bestialité. Arthuro Bandini est un connard, y a pas de doute là-dessus, mais c'est néanmoins un connard attachant et attrayant, un peu fou aussi. Un connard naïf, plein d'espoir et d'arrogance qui vient affronter l'enfer écrasant du Mojave et les yeux fous de Camilla Lopez à Los Angeles... Et tout cela pour quoi ? Pour vivre un rêve tissé d'illusions, le doux rêve de tout ceux qui ont un jour couché des mots sur un papier pour qu'on les regarde enfin...
Dès les premières pages, on pressent le jaillissement de lumière qui éblouira tout le roman. C'est une écriture de la chair que celle de John Fante qui ne fait aucun compromis, qui va à l'essentiel et ça fait franchement du bien. Enfin quelqu'un de vrai dans tous ce ramassis de binoclards prétentieux et incapables de faire vivre ne serait-ce qu'une pauvre phrase.
Dans "Demande à la poussière" par contre la magie a bel et bien pris.
Ses mots étant plus beaux que les miens pour vous le prouver...
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"En regardant au sud en direction des grosses étoiles je savais que là-bas s 'étendait le Santa Ana Desert, que là-bas sous les étoiles un homme pareil à moi gisait dans une cabane; un homme que le désert avalerait plus tôt que moi, et ce que je tenais à la main était son dernier effort, l'expression de sa lutte contre le silence implacable vers lequel il se sentait précipité. Assassin ou barman, barman ou écrivain, qu'importe: son sort était le sort de tous, sa fin ma fin; et ce soir dans cette cité de fenêtres éteintes il s'en trouvait des millions comme lui et comme moi, aussi impossibles à différencier que des brins d'herbes mourante. C'était déjà assez dur de vivre, mais mourir c'était la tâche suprême. Et Sammy allait bientôt mourir."
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C'est tout de même tragique de se dire qu'il faut tourner la tête et regarder au loin, des dizaines d'années en arrière pour dénicher ces petites perles ensablées et enflammées que sont "Demande à la poussière" ou "Sur la route"...