Neil Gaiman a toujours su piocher dans un peu tous les cadres et les contextes pour y inclure sa touche personnelle. Il prend un comics, il y rajoute une touche de féerie et de philosophie. Il prend une chronique sociale, il y rajoute des perdus, des asociaux, face à une société trop hâtive pour les prendre en compte. Il prend une nouvelle psychologique, il en sort tout ce qui n'est pas dit ailleurs, la noirceur aussi bien que la grâce. Mais que se passe-t-il quand on le laisse publier uniquement ce qu'il a dans la tête, sans autres bases que son imagination ?
On a un retour à tous ses thèmes de prédilections, un tableau de ce qui le touche ou l'inspire, les reflets de ses peurs, de ses obsessions, de ses idées. On y retrouve, comme dans ses autres oeuvres, les incarnations humaines de principes, ici les mois, le thème de la confusion identitaire, le très riche bagage littéraire et culturel en général... Tout cela semblant peindre pièce par pièce, un portrait de l'écrivain. C'est le premier mot qui me vient à propos de ce livre : personnel. Un résumé de tout ce qu'un homme a pu rêver, craindre, penser. On marche dans les traces de l'âme de l'auteur, et c'est un chemin au beau paysage.
On aborde un peu tous les thèmes, de l'ésotérique au quotidien, en passant par le gothique. Certaines nouvelles surprennent par leurs décalage les unes avec les autres. Il est étrange de passer d'une évocation du monde des fées au récit d'un homme de main pédophile, des romances d'Arlequin à une vision désespérée de l'enfer. Et oui, ce sont de vrais thèmes. Bizarre, non ? La forme elle même peut changer, passant d'un poème en vers à une nouvelle linéaire, voire une énumération en suivant les symboles du tarot. La seule constante sont les thèmes. L'étrange, la mort, l'incongruité, une certaine poésie, aussi. Bienvenue dans ce livre, où les portes ne mènent parfois nulle part et où être un enfant fantôme n'est pas si mal du moment qu'on a quelqu'un avec qui jouer. On peut même y trouver, sous l'aspect d'un joli poème, les règles à suivre en territoire de contes.
Toutes ses petites histoires finissent par former un tout cohérent, bien que disparate. Comme un ciel nocturne dont on ne pourrait voir la clarté qu'à travers les interstices des étoiles. Et on se prendrait bien à rester les admirer encore un peu.
Kevan
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le 4 mars 2014

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