L’histoire se passe il y a un siècle et un peu plus dans le village de Macondo, qui a connu un court moment de prospérité avant de sombrer dans la désolation. On vient d’y découvrir le cadavre d’un ancien médecin (peut-être un soldat auparavant), arrivé chez le grand-père il y a plus de dix ans et hébergé par celui-ci sans qu’on en comprenne tout de suite la raison. Devant le corps qui attend d’être mis en bière puis enterré, deux autres témoins : la mère et son fils de neuf ans, le petit-fils du propriétaire des lieux. Chacun, à tour de rôle, va exprimer ce qu’il voit, ce qu’il croit comprendre, ce qui s’est passé dans cet étrange village et ce qui pourrait encore arriver tant la tension est vive chez les habitants qui ont tous conservé à l‘égard du suicidé une inextinguible rancoeur. D’autres personnages (le maire, le curé, la belle-mère) apparaissent ; tous interviennent pour relater les événements bizarres auxquels ils ont été associés ou dont on leur a parlé. Les monologues se succèdent, leurs sens se croisent, se dupliquent parfois, enrichissant peu à peu notre compréhension.
Du début à la fin du roman, on est saisi par l’obscurité des situations, leur nature parfois irréelle, le comportement de personnages dont les motivations ne seront pas toutes éclaircies. J’aime beaucoup l’écriture de G. M. Marquez, auteur que je découvre pour la première fois. Les phrases sont sobres, denses ; le style est soutenu mais souple. Et de temps à autre, surgissent un mot, une comparaison surréaliste qui entraînent vers les limites du plausible.
Je conseille sans hésiter ce livre, dont le titre m’est encore un peu mystérieux, à tous les lecteurs curieux et exigeants. Ils ne seront pas déçus.