Critique de Désirer à tout prix par LampeGlouglou
Une belle introduction à la question de l'exploitation de la sexualité par le capitalisme. On en veut plus !
le 6 juin 2022
Cet ouvrage se dessine en deux parties : investir le désir et le désinvestir.
Qu'est-ce que désirer ? Pour Tal, il s'agit avant tout d'un investissement lourd et délicat. L'injonction à jouir fait des personnes qui peuvent pas jouir pour une diversité de raison des machines cabossées. Cette injonction masque aussi les parcours des individus face à la jouissance : endométriose, viol, douleurs chroniques, difficulté à lâcher prise... Tal dénonce une coercition sociale forçant à la sexualité et questionne même la normalisation d'une sexualité épanouie. "Que faire pour tous ces individus que le sexe angoisse, met en colère, plonge dans un véritable désespoir, laisse indifférents ou las ?" Tal affirme que nos angoisses sont en partie lié au système cis-hétérosexuel qui violentent et assigne au rôle d’être passif ou d'actif sans grande créativité. Il ne souhaite pas utiliser le terme d'asexualité car il ne souhaite pas nommer ce désintérêt pour la sexualité par le prisme de l'identité car ce livre se veut aussi pour les personnes non asexuelles brisées. Aussi, il refuse de définir son rapport à sa sexualité sur un manquement.
" La sexualité me faisait du mal et pourtant j'y revenais sans cesse [...] J'en parle comme je pourrais parler d'un sentiment continu de sidération". Tal traite de la violence de son père envers sa mère et lui et des conséquences que cela a eu dans sa vie : une dissociation constante face au fait d’être vulnérable. "Le sexe, c'est l'intimité, la mise a nu. Dans mon cas, il n'était plus que ça : une exposition potentielle au danger, parce que dans mon monde, être vulnérable face à l'autre, c'est prendre le risque de mourir". Il questionne aussi la façon dont la sexualité est un terrain de réminiscence des violences. Tal évoque une "salle d'attente interminable" sans jamais accéder à la sexualité épanouie exemptée. Moi je parlais de "purgatoire du sexe", mais les maux sont les mêmes. 11 millions de françaises vivraient une sexualité malheureuse : comment ne pas parler d'aliénation collective que de fonctionner en automate du sexe ? Il critique l'hypersexualisation et la passivité des femmes dans les films. Tal parle de la sexothérapie et du casse tête que c'est : avoir l'impression de commu-niquer tout le temps et de régresser. Et puis la sexologie = déviance sexuelle, obligatoirement. A ce moment-là, Tal avait besoin qu'on lui dise que si sa sexualité lui était fastidieuse, il pouvait faire autre chose.
Il critique aussi le sex-positivisme, le feminism-washing (coucou Léa) ou le devoir conjugal. Capitalisme et patriarcat, même combat. Cette vision d'optimiser sa sexualité va dans le sens d'optimiser sa vie et ses ressources. Le contrôle social du corps, c'est le biopouvoir de Foucault. Tal parle aussi d'Adrienne Rich et de la contrainte à la sexualité (Oui encore mais il faut que ça rentre), de BDSM et de culture kink. Pour Michel Bozon, pas plus qu'hier, mai 68 et sa libération sexuelle c'est du vent qui ne permet pas d'autonomie. Il parle aussi d'un livre que j'ai trop envie de lire sur la sexualité et le socialisme de Kristen Ghodsee : l'abolition de la propriété privée et la collectivisation permettait aux personnes exploitées, en partie, de ne plus l’être et de jouir plus. De quoi vous motiver à faire la révolution.
Enfin, Tal ne veut pas rajouter des injonctions mais plutôt les rendre visible afin de s'en extirper : considérer la sexualité comme secondaire ou tertiaire à d'autres activités, parce que nous avons aussi beaucoup à apprendre de l'amitié dans nos relations. Et pourquoi pas détruire au passage la famille et l'exploitation que ça pose. Je suis totalement d'accord avec Tal lorsqu'il dit que " l'amitié renferme une charge émancipatrice et révolutionnaire incontestable" qui reprend la vision marxiste d'Alexandra Kollonta. La famille est le lieu où se passe un certain nombre de crimes, ne l'oublions pas.
Pour Tal, nous sommes dans une sexu-société et il faut en sortir. Couple sans sexualité, pas de couple avec sexualité, ni couple, ni sexualité : sentez-vous libre de vous aimer et assurez-vous de l’être en priorité !
Créée
le 23 mai 2022
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