« Deux petits pas sur le sable mouillé ». Un titre qui semble déborder de tendresse, une couverture qui sent le bord de mer, le temps heureux des vacances, l’insouciance de l’enfance, la sérénité de l’avenir… Pourtant, ce récit de vie est bouleversant. Il dit, avec des mots simples, chauds, le combat que mène une famille face à une maladie orpheline qui touche deux de ses trois enfants. Père et mère, tous deux porteurs sans être malades ont transmis à leur petite princesse Thaïs cette maladie qui la détruira petit à petit. Comme toutes ces maladies orphelines, celle-ci est rare, ne préoccupe donc guère le lobbying des chercheurs de remèdes... Le taux de fréquence si bas n’allégera en rien la douleur, l'inquiétude, la révolte des parents qui voient, un jour, sur le sable mouillé 'ce petit pied qui tourne' et conduit vers le néant ! Mais la force du récit est de ne pas se laisser engloutir dans la colère et la douleur. La force du récit est de montrer une réaction possible, un combat à mener, une qualité de vie à construire ... même sur du sable !
Le combat pour chercher une aide médicale, pour mobiliser les énergies, pour lutter, lutter encore, lutter toujours est démentiel ! Il en faut du courage, de l'amour, des tonnes d'amour pour vivre ce quotidien qui se détricote inexorablement, d'autant qu'il se double du constat de l'existence de la même maladie chez la petite sœur.
L'histoire est douloureuse, mais elle existe ! On n'est pas dans un roman fictionnel, on est dans le témoignage, le récit, le partage de vie. Quelle élévation de l’âme !
D'aucun pourrait regretter ne pas trop bien savoir le sort que réservera l'avenir à la benjamine... Mais, le message est là, justement. Dans ce type de combat, la fin ne s'acquière qu'au long d'une longue, lente progression de funambule sur le fin et fragile fil du temps. Ce n'est pas en années que l'on peut compter espérer une amélioration médicale de la prise en charge, de la prévention de ces maladies orphelines. Cela se compte en générations ! Le temps est long, le présent cruel et court. Mais, nous dit Anne-Dauphine JULLIAND, l'amour, s'il est fort et porté en couple, avec les enfants, la famille, les amis et l'équipe soignante, l'amour donc peut gagner !
Gagner quoi ? La transcendance d'une vie à laquelle on est arrivé à donner du sens, au-delà de la mort pressentie, attendue, dépassée. Une mort qui est là, en promesse déjà, mais une vie qui reste présente dans la qualité du sens donné à l'instant puisque la vie ne peut assurer de temps complémentaire pour gagner le combat. Le lecteur ne peut rester insensible à cette mise à plat. Les larmes montent, le coeur est touché...
Anne-Dauphine JULLIAND partage, ici, avec tact, force et style son parcours de maman - combattante courageuse - qui verra sa petite princesse mourir à trois ans ! Indicible... pourtant, cette auteure l'a fait !
A lire, sans aucun doute! Mais pas n'importe où, n'importe quand. Le coeur doit être prêt à vibrer à l'unisson de l'amour de cette mère, prêt aussi à porter la douloureuse fragilité de l'être!