« Éden» m’a enchantée. Dire que j’ai adoré ce texte est bien en deçà du plaisir que j’ai ressenti à le lire. Et je remercie celles et ceux qui m’ont mise sur la piste de cette splendeur.

Alba est linguiste, spécialiste des langues minoritaires en voie d’extinction et elle voyage aux quatre coins du monde pour des colloques. Un jour, elle décide d’acheter une maison délabrée à la campagne dans un lieu sauvage, fait de roche, de lave et de sable… Vingt-deux hectares de terrain ! Elle décide d’y planter des bouleaux (sur une île boisée à 0,3% !), pour compenser son empreinte carbone mais pas seulement. Les arbres permettront de se protéger du vent, assez fort dans cette région. Petit à petit, elle va transformer son jardin, plantant des arbres fruitiers et installant une serre pour y faire pousser des légumes. Elle construit aussi un mur de pierre et, petit à petit, la masure se transforme en un refuge agréable. Les gens du village l’observent de loin et tentent de percer le mystère de cette femme.

Alba est un personnage fascinant : elle ne cherche jamais à se justifier. Elle agit et fait ce qui lui semble bon. Souvent, elle pense à l’origine des mots, décline leur étymologie et elle peut très vite perdre le fil d’une conversation si un mot a soudain retenu son attention. « Tu es la seule personne que je connaisse à rêver de mots isolés » lui fait remarquer sa demi-sœur. Et l’on apprend plein de choses sur la langue islandaise, une langue dans laquelle « il existe plus de cent termes pour désigner le vent en fonction de sa direction, de son degré d’humidité, des frimas ou de la douceur qu’il apporte. » Son père semble comprendre son projet contrairement à sa demi-sœur, Betty, plus terre à terre, qui la met constamment en garde contre tous les risques qu’elle prend en voulant, comme elle le fait, changer radicalement de vie.

« Éden » est un texte très poétique, sensible et plein de fantaisie. Son inventivité m’a surprise, déroutée parfois et amusée assez souvent. Alba est un personnage extrêmement attachant : elle est pure, droite, honnête et va jusqu’au bout de ses convictions. L’intrigue, vraiment très simple, aborde cependant des sujets graves, au coeur de l’actualité : réchauffement climatique, pollution, immigration. Pas de grands discours ici. Non, seulement une femme libre qui agit, à sa mesure, et qui prend le temps d’admirer la beauté des lieux où elle vit. « Nous sommes à chaque instant au centre de notre existence » À nous d’y être pleinement.

J’aurais voulu rester plus longtemps dans ce coin d’Islande battu par les vents et y retrouver tous les soirs Alba et les personnages du village. Là où, semble-t-il, tout espoir n’est pas perdu.

Heureusement, il me reste beaucoup de textes de cette autrice à découvrir…

Bravo à Eric Boury pour sa magnifique traduction.


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lireaulit
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le 21 janv. 2024

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