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Réac, peut-être. En tout cas Égologie n’est pas béatement progressiste ou alternatif – pas quand le progrès et l’alternance consistent en un « bonheur de pourceaux élevés en plein air et au grain bio, tout occupé·es de leur épanouissement personnel pendant que, plus loin, la guerre fait rage » (p. 105).
En 2017, quand les intéressantes éditions grenobloises du Monde à l’envers ont publié ce petit livre à la couverture verte, il n’y avait pas encore d’adolescente à couettes venue de Suède prêcher d’un ton lugubre la bonne parole du Spectacle et de la transition énergétique. Mais le développement personnel, dont les lecteurs et lectrices « relaient une injonction à la responsabilité personnelle parfaitement bien intégrée dans les régimes libéraux » (p. 42), remplissait déjà les rayons des librairies et les poches d’un certain nombre de coachs auto-proclamés.
Et c’est à une écologie mâtinée de développement personnel que s’en prend l’auteure – d’où le titre –, une écologie de petits gestes sans autre véritable portée que le gratification de celui qui les accomplit, presque tout à fait dépolitisée : « Cette écologie urbaine, mais au fond bien peu politique, apparaît ici comme un puissant outil de déni des antagonismes de classe, au profit d’une petite bourgeoisie qui renforce sa certitude de penser et d’agir bien » (p. 87). Et le moins qu’on puisse dire est que la combattante ne lâche pas son adversaire.
Comme c’est assez souvent le cas des ouvrages qui oscillent entre politique et morale, le propos d’Égologie part parfois dans tous les sens ; une diatribe contre le revenu garanti, notamment, semble plaquée là. (Une critique de gauche, donc sans l’argument de la prime à l’oisiveté servi en pareil cas par n’importe quel libéral. La digression n’est pas inintéressante…) Mais le travail d’Aude Vidal, pour être bref, n’est pas moins conséquent : on ne peut pas se dire sérieusement soucieux de l’environnement quand on a chez soi « le four nucléaire qu’il faut chauffer pour un seul pain, la perceuse qui sert une fois par an et bientôt l’imprimante 3D de salon » (p. 77).
Ces quelque cent pages sont même une exhortation à la conséquence, un appel à pousser jusqu’au bout la logique d’une écologie qui ne se limite pas à ces « “petits gestes” » qui « témoignent autant d’une volonté de chacun·e de rassurer à peu de frais ses angoisses écologiques que de celle des institutions qui les promeuvent de faire oublier la toxicité de leurs activités ou leur incapacité à mener des politiques environnementales dignes de ce nom » (p. 34). Un tel propos n’est pas si éloigné – quoique moins allusif et plus terre à terre – de la ligne défendue par certains écologistes radicaux des années 1970, ou actuellement par l’Encyclopédie des Nuisances.
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le 9 nov. 2019
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