Que serais-je sans toi, épisode 2/12
[Avertissement : cette critique est le deuxième épisode d’une étude sur Que serai-je sans toi ? de Guillaume Musso. Pour plus de clarté sur le projet :
http://www.senscritique.com/liste/Musso_parce_qu_il_le_vaut_bien/500931
Que serais-je sans toi, épisode 2/12
I. Un projet d’envergure. B. Le cahier des charges.
4. Du sexe :
Entre les personnages, bien entendu, mais aussi avec d’autres. Nous avons aussi droit à une prostituée de l’est, la collègue undercover avec laquelle on guérit dans l’amour physique les blessures… physiques du travail, une agent coréenne aussi belle que dangereuse ( « Mademoiselle Ho, sexy comme une héroïne de manga dans sa nuisette satinée en dentelle turquoise », p. 227) et des échanges par SMS particulièrement osés (mais coupés à temps : « Tu te souviens de ta tête dans mes mains, de ta langue dans ma… » p. 196).
Le sexe permet des audaces de style.
"Au début, la peur infecte tout.
Au début, la peur fait peur (1) et donne envie de fuir.
Malgré tout, leurs mains se joignent et leur corps se plaquent l’un contre l’autre.
Elle s’accroche à lui comme à un radeau.
Il trouve la force de s’ancrer en elle.
Elle réussit à se nouer à lui." (p. 204)
(1) Oui, vous avez bien lu. La peur fait peur.
Le sexe autorise à parler jeune :
"Elle sentit son regard sur elle et leva les yeux.
Il ne regardait ni ses seins, ni son cul, ni sa bouche.(1). Seulement ses yeux." (p. 164)
(1) Encore heureux : il s’agit tout de même de son père (ce qu’elle ignore encore), et c’est là une bien belle manière de nous montrer la spécificité humaine du rapport père-fille : on ne mate pas sa progéniture.
Mais le sexe n’est pas sale. Ce n’est pas que du sexe.
"Elle lui passe les mains dans les cheveux ; il laisse sa langue fureter (1) sur sa poitrine.
Alors, bien sûr, on peut réduire leurs baisers à un échange de salive, à quelques grammes d’ivoire émaillé (2) qui s’entrechoquent.
Et pourtant…
Pourtant, le temps d’un battement de cils.(3)
Leurs corps tremblent et la peur reflue. "(p. 204)
(1) On appréciera l’érotisme fulgurant du terme lorsqu’on se rappellera de son sens premier : Se livrer à la chasse dans (un lieu) avec un furet, et qui au sens figuré signifie Chercher, s'introduire partout avec curiosité dans l'espoir d'une découverte. (in Le Grand Robert). Voulons-nous en savoir plus ?
(2) On remarquera la préciosité de la périphrase.
(3) Audace stylistique : un complément circonstanciel de temps suivi d’un point. Sévèrement réprimé dans les rédactions de cinquième.
5. Des bas-fonds :
Pour satisfaire l’appétit du lecteur pour le danger. Beaumont est un héros sombre : il fume du shit et a des pornos dans sa dvdthèque, il a fait du undercover, y a laissé des plumes. Drogue, (écrite cekra, comprenez crack en verlan pour une immersion garantie dans les arcanes des milieux interlopes) mères héroïnomanes mortes en couches, cité lugubre, shit, oligarque mafieux et baron de la drogue… Nos héros semblent avoir regardé TF1, et avoir vécu dans leur véritable vie une semaine de son programme. « Leur histoire était ce qu’ils avaient connu de meilleure et de pire. Comme la dope. » (p. 63)
6. De l’argent :
Très important. Le lecteur veut du rêve. Pour oublier qu’on n’aura pas la clim dans la clio dans l’embouteillage du retour de plage, rien de tel que yacht, hélicoptère, hydravions privés, ou l’Aston Martin DB5. Une voiture que nous pouvons déjà imaginer chère, mais attention, celle-ci « avait une histoire très particulière puisqu’elle avait « joué » dans les premiers James Bond, Opération Tonnerre et Goldfinger ». En effet, « Considérant les voitures comme des œuvres d’art, Archiblad ne conduisait que des modèles uniques ». (p. 62). Afin que le rustre ne mésestime pas la valeur marchande d’un tel véhicule, M. Musso juge utile de préciser, quelques lignes plus tard, après avoir révélé que la voiture possède entre autre de vraies mitraillettes dissimulées dans les clignotants et des lames rétractables, que « la voiture avait été vendue pour plus de 2 millions de dollars à un mystérieux homme d’affaire écossais » (pour l’abruti, le mystérieux homme d’affaire est Archibald lui-même)
Et pour faire passer le gout d’éponge du Pan Bagnat, les restaurants de luxe dont on détaille les menus saugrenus, grands crus et bouteilles à 40.000 dollars (dollars, bien sûr, c’est plus chic qu’euros) :
« Il regarde d’un air absent son saumon mariné « citron, caviar, vodka », tandis qu’elle déguste chaque bouchée de ses coquilles Saint-Jacques à la plancha. » (p. 109)
« Sur la desserte près de leur table, un serveur disposa un plateau d’argent (1) sur lequel était ordonné un assortiment d’appetizers (2) préparés dans des verrines (3) : huitres (4) glacées (5) au caviar (6), salade d’escargots aux cerises (7), crevettes grillées au beurre de cacahuètes, fusion de homard (8) et de cuisses de grenouilles aux pistaches… » (p. 175)
(1) = riche
(2) = classe
(3) = tendance
(4) = riche
(5) = personne ne comprend, sauf les ultra riches des restaurants ultra tendance
(6) = riche
(7) = personne n’apprécierait, sauf les ultra riches des restaurants ultra tendance
(8) = riche
Même dans le coma (nous y reviendrons), le luxe est là :
« Je me demande si avant le dessert, je ne vais pas me laisser tenter par le pigeonneau désossé au foie gras, dit-il en feuilletant le menu. » (p. 256)
Caviar, saumon, foie gras, huitre… les best-sellers de ce que le pauvre considérera comme le summum de la richesse sont présents.
L’humanitaire, l’international, l’américain et le surnaturel dans l'épisode trois :
http://www.senscritique.com/livre/Parce_que_je_t_aime/critique/35183241
L'intégralité de la saga : http://www.senscritique.com/liste/Musso_parce_qu_il_le_vaut_bien/500931