J'ai hésité à mettre une note à ce livre par crainte de me faire taxer d'anti-féministe alors qu'il ne s'agit clairement pas de ça. Ce livre montre une vision de la société actuelle qui est cohérente et sensée. Le lien entre féminisme et écologie par exemple est très intéressant et permet de donner des perspectives nouvelles sur un sujet largement abordé. Seulement, malheureusement quatre points me froissent. 
Le premier, assez anecdotique, est que de nombreux faits montrés comme vrais ne sont pas assez expliqués et manquent d'exemples. C'est le cas par exemple du "sexisme des systèmes juridiques" ou des "déportations" évoqués page 21 qui, bien que certainement justes, ne sont pas suffisamment développer avec des faits comme c'est le cas ailleurs pour d'autres sujets.
Le deuxième, plus embêtant, est l'utilisation des mots parfois inappropriés ce qui, pour des professeurs de philosophie (qui basent leur travail sur la compréhension des termes et leur correcte utilisation) est surprenant. J'en veux pour exemple la page 32-33 qui parle des "femmes de la classe ouvrière qu'elle soient racisées, migrantes ou blanches ; cis, trans ou non binaires ; femmes au foyer ou travailleuses du sexes [etc.]". Ici je ne comprends pas qu'on oppose les femmes racisées, migrantes ou blanches car des femmes peuvent faire parti de plusieurs groupes en même temps (sauf racisées et blanches évidemment). De même, pourquoi distinguer femmes au foyer et travailleuses du sexe? Quel est le lien entre ces deux catégories? Les autres groupes (pas tous cités), séparés par des points virgules sont des groupes qui s'opposent ou se répondent. Pourquoi pas ceux-là ? Il y a donc un véritable problème dans l'utilisation des mots par les autrices.
Le troisième, particulièrement précis, est l'idée de la grève du sexe et des sourires dont il est question page 21. Comment espérer régler un problème social avec une solution dans la sphère privée, d'autant plus qu'elle est au détriment d'un partenaire choisi. Le sexe et les sourires apparaissent en plus, par l'utilisation de cette grève, comme un moyen de pression et sous-entend alors que le ou la seul.e. bénéficiaire de ces rapports est le ou la conjoint.e. On parle d'ailleurs de ces activités comme des "travaux non rémunérés" dans la phrase d'après. Le sexe n'est en aucun cas un travail mais une activité qui se fait avec le consentement des deux personnes. (sauf dérives graves qui sont d'ailleurs très bien traitées dans ce livre).
Enfin, et c'est ce point qui me pose le plus de problème, il y a de véritables erreurs socio-historiques dans ce manifeste. J'en veux pour exemple la page 59 qui rend responsable le capitalisme de la création des normes et régularisations "parmi lesquelles le binarisme de genre et l'hétéronormativité". Ce fait est totalement opposé au matérialisme historique marxiste suivi par les autrices tout au long de l’œuvre. Tout d'abord le proto-capitalisme n'apparait qu'avec l’avènement de la bourgeoisie comme groupe socio-économique au XVe siècle. Avant cela (donc avant le capitalisme) c'est L’Église qui a créé ces normes. L'hétéronormativité a été imposée par le christianisme tout au long du Moyen-Âge. Pour ce qui est du binarisme (j'entends par là la prise en compte de deux sexes masculin et féminin), cette idée était déjà présente dans la Grèce Antique puisque Platon déjà parlait de trouver son âme sœur car selon lui nous étions au départ imbriqués avec une autre personne du sexe opposé et nous devions retrouver notre moitié pour être enfin complet.
Je pourrais aussi parler des omissions (volontaires ou non je ne sais pas) comme celle de la critique (tout à fait justifiée) de l'homophobie de notre société capitaliste sans mentionner une seule fois les déportations faites par la nomenklatura stalinienne dont étaient aussi victimes les homosexuels.
Je pourrais continuer mais ma critique est déjà suffisamment longue comme cela. Je vous remercie d'avoir pris le temps de lire mon texte et suis ouvert à tout débat et discussion sur ces sujets.
ozs
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le 12 juil. 2019

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