« Tel un cafard, j’avais flotté avec mes maigres pattes au fond de la cuvette de chiottes géante qu’était New-York. »
Voilà, tout est dit. Impossible de mieux résumer ce roman. Le narrateur, dont on ne connaitra jamais le prénom, vit dans le New-York des années 80. Viré par sa copine, il squatte le canapé d’un pote, trouve un boulot dans un cinéma porno gay, débute une relation avec une femme mariée et surtout, surtout, foire tout ce qu’il entreprend.
Difficile de résister à un tel anti-héros. C’est simple, on est au-delà de la poisse. Les déconvenues qui s’accumulent fascinent, les coups durs successifs entraînent une dégringolade hypnotisante. Il y a une forme de voyeurisme à suivre la descente aux enfers de ce pauvre bougre, à l’accompagner dans son errance miteuse.
Il faut dire aussi que notre raté professionnel fait preuve d’une lucidité et d’une autodérision qui force l’admiration. L’empilement des mauvais choix n’entraine jamais le moindre apitoiement. Pas le temps de se plaindre, il faut focaliser son énergie sur la recherche des moyens de subsistance les plus élémentaires.
Et au-delà du récit d’une vie au jour le jour dans les bas-fonds, c’est le portrait du New-York underground d’avant la gentrification de ses quartiers les plus pauvres qui fait le charme du récit. Une ville glauque, poisseuse, violente, foyer d’une contre-culture aussi misérable que pleine de vitalité.
Publié en autoédition au début des années 90, Fuck up est devenu un roman culte. Un roman où le tragi-comique n’a jamais aussi bien porté son nom, un roman à l’humour noir bouillonnant où la cruauté le dispute au grotesque, et qui met en scène l’un des plus grands losers de la littérature américaine.