Les germes de la destruction.
Coincé entre la réputation boboïsante de son oeuvre et son image médiatique peu flatteuse, je n'avais jamais pris le temps de m'attarder sur le travail de Michel Houellebecq, trop occupé à escalader la montagne poussiéreuse de bouquins qui me nargue depuis trop longtemps. Je tente ici de réparer cette lacune, sous les conseils avisés ( et répétés) de mon bon ami Dino (salut grand fou, si tu me lis). Cet essai sur l'immense Lovecraft n'est peut-être pas la meilleure façon de découvrir l'oeuvre de Houellebecq mais j'aime bien commencer par le début (enfin presque, le bonhomme a quand même plusieurs travaux derrière lui à ce moment-là) et on a eu la gentillesse de me le prêter.
Le premier mérite de Houellebecq est de faire preuve d'une grande honnêteté, ne cherchant jamais à théoriser à outrance sur l'oeuvre de Lovecraft, laissant le style pompeux à ceux et celles qui l'utilisent mieux. La lecture est au contraire facile et passionnante, ayant pour but premier de comprendre un peu mieux comment l'auteur des "Montagnes hallucinées" a pu coucher sur papier un univers aussi tentaculaire et ignoble, mais ô combien fascinant, et surtout d'encourager le néophyte à s'attarder sur sa bibliographie.
Abordant son essai comme un véritable roman où la structure serait tributaire d'évènements réels, Houellebecq établit avec pertinence un parallèle entre les mondes imaginaires de l'auteur et la psyché contradictoire d'un homme ouvertement raciste et réactionnaire, bouffé par la haine, pourtant décrit comme courtois et gentil par ses proches.
Entrecoupé d'extraits de ses écrits et de sa correspondance, "Contre le monde, contre la vie" dépeint avec une certaine amertume la vie presque gâchée d'un homme refusant par dessus tout le réel, rejeté par le monde de l'enfance auquel il n'appartient plus et ne trouvant aucun intérêt à la société des adultes, un homme qui aurait pu être relativement heureux mais qui en décida autrement. Triste constat.