Ce livre commence par deux témoignages émouvants, écrits par deux Ray qui jadis, alors âgés d'une dizaine d'années, rêvaient sans cesse aux créatures qui, autrefois, foulaient de leur pattes gigantesques les terres arides et marécages boueux en quête de quelques fougères géantes à mâchonner ou de quelques carcasses à dévorer. Un monde d'une sombre beauté, déchiré par des écharpes d'une épaisse brume, la placidité des clapotis vaseux et hautes herbes ondulantes sous la brise s'accordant avec les hurlement rauques et râles puissant de scènes sanglantes d'une violence titanesque.
Ces deux Ray rêvaient devant The Lost World animé par Willis O'Brien, accomplissant leur premiers petits "boulots" pour se faire payer en places de ciné et aller voir et revoir ces monstres antédiluviens prendre vie encore et encore. Et puis ce fut la première d'un film incroyable qui scella à jamais la vocation de ces deux gamins : King Kong.
Dès lors, le premier Ray avait déterminé son irrévocable vocation : Animer à son tour ces dragons d'un autre temps, alors que son camarade en devenir deviendrai un des plus grands auteurs de Science Fiction/Fantasy d'un âge d'or à jamais regretté.

Les deux hommes reviennent brièvement sur leur passion commune et leurs projets de collaborations dont une seule aura vu le jour, Ray Harryhausen animant "Le Monstre des Temps Perdus" directement inspiré de la nouvelle "La Corne de Brume" de Ray Bradbury, et c'est avec un léger noeud dans la gorge qu'on lit ce défunt dernier espérer une prochaine collaboration avec son ami, un projet qui laisse aussi rêveur que mélancolique.

Je ne saurais comment décrire cette impression au delà de la jubilation, sensation juste touchante, de lire un auteur ô combien renommé écrire avec une limpide simplicité le juste ressenti qu'on peut soi même avoir devant telle chose, et se retrouver joints dans une fascination totalement partagée pendant quelques lignes. Retrouver les mots exacts qu'on emploie depuis des années, quand bien même on aimerait avoir à se justifier encore de rester émerveillé par les lézards préhistoriques à 30 piges. Des mots qui parlent de moi alors que je découvrais King Kong tout gosse, bouche bée. C'est complètement... fabuleux. Et.. mais bref, l'intérêt étant ici d'expliquer en quoi je recommande ce livre, je vais arrêter de suite de parler d'moi, et hop.

Je recommande ce livre parce que ce sont quatre nouvelles et deux poèmes écris par un grand gosse, qui entre Chroniques Martiennes et Fahrenheit 451, se permettait une petite promenade de santé dans les arbres géants, fougères et autres séquoias gigantesques éclipsant le soleil, sous les ombres mouvantes étrangement familières et discrètement inquiétantes de cous démesurés se déliant à la surface croupies des eaux stagnantes, de silhouettes sinueuse dans les herbes folles, de démarches intrigantes dans la brume épaisse...

Ces quatre nouvelles valent toutes les histoires pour gosses du monde, la première décrivant dans un climat rêveur proche d'une inquiétante étrangeté la passion "dévorante" d'un enfant pour ces animaux, voulant devenir lui même tyrannosaurus rex.
La deuxième est une pure nouvelle de pulp, parlant de voyages dans le temps et de safaris préhistoriques.
La troisième nouvelle est surement la plus belle et profondément touchante. "Corne de Brume", qui a inspiré "Le Monstre des Temps Perdus" (oui faut suivre un peu hein), reste, au delà d'être une empreinte de la rencontre entre ces deux Ray de génie, une petite perle émouvante, contant l'histoire de deux hommes au sommet d'un phare scrutant l'horizon sous les sons lugubres de langueur de l'inlassable corne de brume, leur yeux cherchant là ou le projecteur géant passe et balaie la nocturne surface d'encre glacée, jusqu'à l'improbable rencontre d'un animal impensable surgi des abysses, draguant dans son lent sillage toute la mélancolie d'une vieillesse esseulée.
La dernière nouvelle, "Tyrannosaurus Rex", peut être vue comme un hommage direct à son ami Ray Harryhausen, décrivant les déboires d'un animateur de dinosaures amoureux de ses créatures, ses seuls enfants, les protégeant contre la voracité Hollywoodienne.

Je recommande ce livre aussi pour les somptueuses illustrations qui ponctuent ces écrits et qui font de ces quelques pages une merveille artistique, regroupant des dessins allant des sublimes créatures alambiquées aux trames et hachures torturées de William Stout aux dessins doux et empreints d'une étrange présence de Moebius en passant par la violence des paysages de Steranko.

Je recommande ce livre parce-qu'il est juste émouvant, qu'il murmure à l'oreille d'une fascination que beaucoup ont connu et qu'évoquée par Bradbury, il y a peut être une petite chance pour qu'elle retrouve le temps de quelques lignes un peu de sa flamme.

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le 1 juin 2013

Modifiée

le 1 juin 2013

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zombiraptor

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