La lecture du roman m'a procuré des sensations très contrastées.
D'abord, j'ai été très enthousiaste. Dans la première partie du roman (les trois premiers journalistes), le personnage de Tach est formidablement misanthrope, misogyne, mis-tout-ce-qu'on-veut. Et ça, j'ai adoré. Un titan étrange, hors de l'humanité, un monstre isolé, reclus et fier de l'être. Sa façon unique d'envoyer tout le monde au diable, son sens de la formule, sa supériorité écrasante sur ses interlocuteurs terrifiés, tout contribuait à en faire un être inoubliable.
C'est l'arrivée de la "journaliste femelle" qui gâche tout. Amélie Nothomb succombe à l'erreur qui consiste à vouloir psychologiser son personnage, expliquer pourquoi il est devenu comme cela. Erreur de scénariste de série B qui aurait lu "La Psychologie pour les piliers de comptoir". Trouver la faute originelle, rationaliser l'énigme. En tombant dans ce panneau, Nothomb désacralise son personnage. Erreur fatale. Du coup, la seconde partie du roman perd son intérêt, les propos deviennent plus prévisibles.
Ce n'est que l'extrême conclusion qui relève un peu le niveau (mais je ne vais pas la dévoiler ici). Contrairement à beaucoup de critiques que je viens de lire, je trouve cette fin logique, la seule sortie honorable pour ce roman.
Certains passages sont un peu difficiles à suivre, car le roman multiplie les réflexions sur la littérature. Ca sent parfois un peu trop son étudiante en lettres qui voudrait rentabiliser ses cours. D'où les réflexions sur les métaphores, les lieux communs et le sens des paroles. Mais on passe rapidement là-dessus.