Habituellement, je ne suis pas friande des bios des starlettes qui se sentent toutes obligées (par leur agent, par leur égo, par leur portefeuille?) de vendre leur histoire perso et leurs états d'âmes au grand public.

Mais là, intriguée par le titre osé et par les critiques (même si rebutée par la couverture), j'ai tenté le coup.

Et le coup, ça le valait.

Parce que Jennette écrit bien, d'une plume juste, acérée et sans fioriture. Elle se livre avec authenticité, sans essayer d'arrondir les angles ni de faire reluire la carrosserie. Il en faut, du courage, pour décrire comment on passe à côté de sa vie aveuglément parce que manipulée dès son plus jeune âge par une mère malveillante, égocentrique, manipulatrice, maltraitante et complètement cinglée (comme il en faut pour décrire avec lucidité ce même aveuglement passé, puis la phase de violent déni qui en découle ensuite). Il faut du courage pour décrire sa plongée dans les troubles alimentaires, les addictions et le rapport tordu avec son corps et sa sexualité, dans l'aigreur, la fuite et la dépression.

Plus que la description du monde cruel des enfants stars et du show-business, de son obsession froide pour l'argent et les apparences, c'est la justesse psychologique avec laquelle Jennette décrit l'emprise de sa mère, le dysfonctionnement de sa famille, les conséquences de tout cela sur la construction de sa personnalité et sur sa santé physique et mentale, comment elle lutte et finit par s'en extirper en tournant enfin le dos à cette mère affreuse, qui fait toute la qualité de ce livre.

Cette description chirurgicale, sans commentaire ni jugement, avec laquelle on voit précisément se mettre en place la sournoise manipulation/culpabilisation permanente de la mère, qui instrumentalise jusqu'à son cancer et sa mort pour garder la main-mise sur la vie et l'esprit de sa fille, veillant à la rabaisser et à lui couper les ailes et les pattes à jamais afin que son oiseau jamais ne puisse s'envoler loin d'elle, même après sa mort, et tant pis si l'oiseau souffre le martyre.

Bravo pour le courage, la prise de distance et l'authenticité, la finesse psychologique et la force de caractère d'avoir su dire stop à tout cela, et plus encore de l'avoir exposé sans filtre au grand public. Une mise à nue louable pour son courage (je me répète, mais c'est vraiment ce que j'ai retenu de ce livre).

Bravo pour l'humilité; l'auteure ne cherche jamais à se donner le beau rôle, avoue sa honte d'avoir incarné des personnages ridicules, ne cherche pas à cacher les choux-blancs de nombreuses des séries de seconde zone dans lesquelles elle a pu être castée ensuite. Bravo d'avoir réussi à claquer la porte au nez de ce travail d'actrice qui ne lui correspondait pas et qui lui a été imposé dès ses 6 ans, d'avoir su passer au-dessus de cette personnalité construite de toute pièce par sa mère pour pouvoir enfin assumer la sienne, la vraie (on sait que Jennette est aujourd'hui parvenue à vivre de ses aspirations premières, l'écriture, puisqu'elle est maintenant scénariste, réalisatrice, essayiste et auteure).

Bravo, respect, vraiment.

Adelyn
9
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le 8 août 2024

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le 8 août 2024

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Adelyn

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