Ce deuxième tome de la saga du pont, qui fait suite à "Lumière virtuelle", se passe à la fois à Tokyo et dans des coins improbables du cyberspace. Comme d'habitude, Gibson alterne deux narration qui vont converger vers un dénouement spectaculaire.
- Il y a d'abord cette jeune fille de Seattle, Chia, qui appartient au fan du nouveau John Lennon, Rez, du groupe Lo/Rez. Elle a entendu des rumeurs selon lesquels Rez envisagerait d'épouser une célébrité uniquement numérique, Rei Toei. Elle a deux amies, Zona, qui dit être une chef de gang de Mexico, et Kelsey, une gosse de riche qui lui paie le billet pour qu'elle aille enquêter à New Tokyo. A l'aéroport, Chia fait passer le sac d'une blonde incendiaire, ce qui cache bien sûr une histoire de mule. La mafia russe n'est pas bien loin, heureusement Chia va trouver de l'aide dans la personne de Masahiko, le frère de la fille de la section de fan de Tokyo qui la reçoit. Masahiko refuse la scolarité et vit sur le net, dans une sorte d'internet parallèle qu'on appelle la Cité Interdite, ou Hak Nam.
- Et puis il y a Colin Laney, qui dans sa jeunesse a été exposé à une substance chimique censée décupler certaine faculté. Incapable de se concentrer, sauf par périodes très intenses. Un groupe de chercheurs français l'a encouragé à développer une technique qui lui ai propre : il analyse les données internet en y cherchant les "points nodaux", ceux qui annoncent un changement. Recruté au départ par une sorte de conglomérat de tabloïd, Slitscan, puis éjecté pour avoir déboulé dans l'appart' d'une starlette en train de se suicider, Colin trouve un job sur recommandation de ce bon vieux Rydell. Il s'avère bosser pour Lo/Rez, côtoie Rei Toei dans un bar alternatif, puis va trouver le point de convergence. Le dénouement a lieu à l'hôtel Di, un Love Hotel, dans la suite 17.
Il y a des personnages savoureux - mention spéciale à la masse de chair Blackwell et à la pupleuse et alcoolique Maryalice. Il y a quelques rares passages de violence, en général sous forme elliptique. Il y a Tokyo, qui a subi un tremblement de terre, et dont les nouveaux immeubles ont un aspect étrangement organique, du fait de l'emploi de nanomachines pour la reconstruction. Il y a plein de notations sur la société japonaise - les hentaï, les fans préados, etc...
Encore un très bon Gibson, qui met ici l'accent sur le rôle des réseaux sociaux et les phénomènes de célébrité. Très en avance sur son temps (1996), il prédit les flash-mobs (les collégiennes qui convergent vers l'hôtel Di), le retour de Hong Kong à la Chine, le rôle des réseaux sociaux, l'utilisation d'avatars, la création de salons de chats dédiés, etc...