Poliorcétique sans fin...
Il est des œuvres qui traversent les siècles, démontrant par là même leur qualité et leur intemporalité. Elle sont assez rares et celles, encore lues largement de nos jours, qui ont passé les millénaires sont plus rares encore.
L’Iliade est de celles-là.
Il pourra donc paraître outrecuidant d'oser critiquer un tel monument déjà entré au Panthéon littéraire occidental. Je me contenterai donc d’exprimer mon ressenti quant à cette fastidieuse lecture.
Fastidieux il le fût. Les styles d'écriture sont comme les modes, ils évoluent sans cesse. Forcément, un écrit du début de notre ère, dont la tradition orale remonte quelques siècles plus tôt encore, ne peut que se révéler en décalage avec notre façon d'écrire contemporaine. Certes, il est conçu pour être narré lors d'agapes par un aède à la voix de stentor.
Mais sous forme de livre, ces répétitions sans fin (la façon dont les messagers répètent tels des enregistreurs audio est stupéfiante), ces présentations pompeuses de guerriers qui vont s'étriper (oui, tu es le fils de tes ancêtres prestigieux on a bien compris), ce combat qui n'en finit pas (les chants se suivent et se ressemblent, un coup les troyens avancent, un coup ce sont les grecs) s'avèrent fastidieux à suivre.
Cela dit, j'ai trouvé une forme d'enchantement narratif au détour de certains chants qui sauve l'intérêt que j'ai pu ressentir vis-à-vis de cette fresque.
Tout d'abord, on appréhende une partie l'esprit de cette époque. L'instinct grégaire, la prégnance des cités-état, des serments, des offrandes aux divinités, la place des femmes et des esclaves, l'importance de présenter son ascendance avant un combat (surtout pour les auditeurs du chant narré par l'aède) puis de dépouiller l'adversaire vaincu...
Ensuite certaines formules au style fleuri sont des petits bijoux : "les achéens aux belles cnémides" est de loin ma préférée mais le "Zeus altitonnant" n'est pas mal non plus.
Puis éclate la force de la dramaturgie dans certaines scènes : Achille qui pleure Patrocle, Hector qui affronte Achille, Priam qui vient chercher la dépouille d'Hector, les lamentations d'Andromaque, Hécube, Hélène...
Enfin les dieux et leurs querelles qui, par le truchement des mortels, se défient et se vengent. Comme elles sont humaines ces figures immortelles ! C'est l'interventionnisme avant l'heure.
Au final, c'est une lecture intéressante mais pas vraiment passionnante que ce livre ouvert sur l'antiquité méditerranéenne. Ces combats sans fins ne sont toujours pas achevés après dix années de lutte et le temps commence à être un peu long.
Comme je goûte bien davantage la mythologie que les combats pour une cité, je gage que le retour d'Ulysse l'artificieux sera plus riche en rebondissements.