Indian Creek, c'est un petit cours de rivière au coeur des Rocheuses dans l'Idaho, en bordure du Montana, juste en dessous du Canada. Un endroit où il fait bon vivre l'hiver. C'est aussi l'endroit qui aura donné le titre à ce livre autobiographique. Un livre qui m'aura sans aucun doute laissé de très bonnes sensations de lecture.
Et pourtant ça n'avait pas démarré sur les chapeaux de roues, avec pour commencer, une certaine déception en me rendant compte que le côté nature writing annoncé n'est finalement que l'histoire d'un étudiant (le jeune Pete) qui ne sait pas trop quoi faire de sa vie et qui, par un concours de circonstances, se retrouve à planter sa tente juste avant l'hiver 1978, pour le compte des gardes forestiers du coin.
Sa mission ? Surveiller des œufs de saumon avant qu'ils n'entament leur migration. Ces petits chérubins ont beau être plus de deux millions, ils ne l'occuperont que quelques minutes par jour.
Ses contraintes ? Vivre seul et isolé pendant 7 mois, au cœur des Rocheuses, avec des accès aux routes bloqués par la neige dès le début de l'hiver, et des températures nocturnes pouvant descendre à -40 degrés Celsius. Dur dur pour notre jeune héros, jusqu'alors plus habitué aux beuveries qu'à jouer aux survivalistes.
Allez suffit je n'en dirai pas plus concernant l'histoire, place aux impressions.
"Sur quelques miles encore, nous nous dirigeâmes vers le sud [...]"
Ça c'est du passé simple qui détaille une action. Et ça, je n'en peux plus ! Aucun souci quand c'est dans de la littérature plus ancienne, mais dès qu'on repasse après les années 1950, ça me chagrine. En Anglais cette gêne ne se ferait pas sentir, puisque le preterit et le past perfect sont plus polyvalents et n'ont pas cette connotation veillotte. Mais là, je ne sais pas, ça me rebute de plus en plus. Et que dire du passé antérieur employé à outrance (pas dans ce livre heureusement) ? Il m'a carrément fait lâcher certains livres. Mais bon, suffit de se plaindre, il ne me reste plus qu'à me lancer dans les VO, je n'aurai plus tout ces problèmes 😅
Il fut alors temps de revenir à notre trappeur en herbe, cette sensation liée au passé simple fut, de toute façon, passée aussi vite que la fin de l'automne au bord de l'Indian Creek.
L'hiver arrive et tout commence alors. C'est véritablement ici que nous, lecteurs et lectrices, sommes plongés dans cette tente et ce désert hivernal aux multiples facettes. L'immersion se fait très naturellement, et nous partageons alors cette solitude avec Pete Fromm, prêts à découvrir cette nature incroyable et dangereuse.
Quand on s'intéresse à ce livre, on entend pas mal parler de son côté comique. Eh bien, pour ma part, je n'adhère pas vraiment. C'est vrai que certaines situations sont parfois bien cocasses, mais ce qui m'a marqué, c'est avant tout la sincérité avec laquelle l'auteur s'est livré, révélant sans filtre apparent ses faiblesses, ses limites, ses craintes et ses joies candides. Cette aventure prend les traits d'un véritable petit récit initiatique, qui trouve ses racines au cœur de l'hiver quasi polaire des Rocheuses. C'est véritablement touchant de suivre l'évolution de cet homme qui n'était pas encore auteur, et de réaliser progressivement à quel point ces sept mois allaient marquer, et transformer, sa vie.
En tout cas, c'est fou comme ces récits face à la nature résonnent en nous, qui nous en sommes tant éloignés. Il y a quelque chose de fascinant à imaginer quelqu'un tout seul au milieu de l'immensité de la nature. Et un petit quelque chose rassurant à s'imaginer se réfugier sous les couettes chaudes du lit de sa tente, bien protégé et à l'abri.
Pour conclure, si ce n'est pas un livre qui marquera par son style ou sa verve, il saura sans nul doute, laisser son empreinte vibratoire en nous, à travers l'aventure initiatique, assez folle, d'un jeune homme plongé dans l'immensité de la nature.