... un gâchis littéraire.
Plume de talent qui sait d'ordinaire esquisser des portraits profonds et attachants, Anne Rice s'est aventurée dans une expérience littéraire érotique. Je n'ai rien contre le genre, bien au contraire.
Néanmoins, l'auteure a choisi le prisme du conte traditionnel pour développer son récit. Il me semble que dès cet instant, un travers a été pris.
En effet, la structure narrative du conte traditionnel présente souvent les personnages de façon sommaire avant de les exposer à divers obstacles qu'ils vont devoir franchir avant de pouvoir se réaliser. Il subsiste d'ailleurs, au niveau de la forme, un côté naïf qui limite à mon sens le développement de la psyché des personnages, même si les contes sont généralement source de sagesse.
Dans cette initiation, on retrouve cette naïveté inhérente au conte dans un genre pourtant plus adulte. C'est ainsi que rapidement, une sensation de distance se crée, annihilant toute éventuelle empathie avec les personnages. L'héroïne principale, Belle, apparaît comme une poupée sans personnalité qui se laisse ballotter par ses geôliers, subissant les outrages sans agir sur les événements. La fadeur des autres belligérants ne fait qu'ajouter à la lourdeur de la répétition des scènes d'humiliation : fessées, bondage et autres violations de son corps sont d'un ennui !
Où est donc passé l'épice de l'érotisme qui donne tout son sel à des récits situés entre ombre et lumière ? Ici, tout n'est que répétition sans intérêt. Je te pince, tu pleures, je te frappe les fesses, tu gémis de douleur. Ouah, c'est la folie... et le niveau zéro de l'érotisme. Il y avait pourtant du potentiel avec cette idée.
Malheureusement, en dépit de son talent légendaire, Anne Rice nous livre là une initiation à la castration littéraire.
L'expérience ne se révèle guère stimulante. La suite saura t-elle éveiller un semblant de désir ?