Jack Barron est une superstar. Chaque semaine, il donne la parole à des téléspectateurs en détresse et règle leurs problèmes. Il confronte les puissants au peuple, et cent-millions d’Américains adorent ça. Pas naïf pour un sou, il connaît son business et n’est pas prêt de le lâcher. Toutefois, un dilemme se pose le jour où la Fondation pour l’immortalité humaine s’intéresse à lui. Si l’immortalité n’est encore pour beaucoup qu’un rêve, cela n’empêche pas cette dernière de placer ceux qui le souhaitent en hibernation, moyennant beaucoup de pognon, en attendant de trouver le remède à la mort. Evidemment, donner un tel pouvoir à une organisation privée ne plaît pas à tout le monde, et avoir Jack Barron de son côté aiderait beaucoup l’un ou l’autre camp. Pourtant, tout ce que veut Jack Barron, c’est présenter son émission et oublier son ex-femme. Reste que certaines propositions sont difficiles à refuser.
C’est peu dire que Jack Barron et l’éternité ne m’a pas laissé indifférent. Après une centaine de pages, je me demandais vraiment où j’étais tombé, frappé que j’étais par le machisme écœurant de l’ensemble, un style étrangement daté et l’apparent besoin compulsif de l’auteur de placer du cul un paragraphe sur deux. Un classique, ça, vraiment ? Même son thème majeur m’a semblé bizarrement traité. Ce roman traite de l’immortalité. Soit, bonne idée. Mais pourquoi nécessairement partir du principe qu’elle est forcément désirable, que tout le monde souhaitera forcément l’obtenir à n’importe quel prix ? Pourtant, impossible de m’arrêter. Pourquoi ? Parce que Norman Spinrad, l’auteur, laisse constamment comprendre au lecteur que quelque chose (mais quoi ?) l’attend. De plus, les émissions de Jack Barron rythment efficacement le roman et possèdent quelque chose de jubilatoire (ce sont clairement les meilleurs passages du livre), comme autant de pierres angulaires qui font avancer l’histoire.
Ecrit à la fin des années soixante, Jack Barron et l’éternité a pour autre thème majeur celui de la ségrégation, et s’intéresse aussi au rapport étroit qui existe entre les idéaux d’une part, l’argent et le pouvoir d’autre part, autant de sujets plutôt bien exploités. A vrai dire, je suis vraiment surpris de devoir admettre que j’ai aimé ce livre. Après en avoir lu la moitié, je l’aurais bien cloué au pilori, tant son sujet paraissait mal exploité et qu’il semblait avoir mal vieilli, mais sa construction efficace compense tellement bien ses faiblesses que le lecteur est finalement happé jusqu’au dénouement final.
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