J'ai pris mon pied avec cette lecture. Je ne suis pas un grand lecteur de roman, je ne sais donc pas encore exactement ce qui me branche. Mais au vu de ce que j'ai préféré ces derniers temps, je commence à me faire une idée. Les digressions, les intrigues minimalistes, les récits intimes mettant en avant le particulier, les personnages communs approfondis : voilà des éléments qui me bottent. Et ils s'y retrouvent tous dans "Jacques le fataliste".

Ainsi, il ne se passe pas grand chose dans ce bouquin. En gros, Jacques tente de raconter l'histoire de ses amours, mais est sans cesse interrompu par son maître ou par d'autres intervenants ou simplement par sa mauvaise santé. Est-on pour autant hors des sentiers battus ? Pas vraiment, si on analyse, on se rend compte que Diderot respecte les codes de dramaturgie : on a un objectif principal, raconter une histoire, des conflits-obstacles (les choses de la vuie qui vont interrompre le récit), des résolutions (on écoute les autres histoires, ou on attend que l'élément perturbateur parte avant de reprendre son histoire), et une situation finale. Les personnages sont assez bien approfondis, pas trop de traits de caractère, l'idée n'est pas d'en faire des êtres humains réalistes, mais juste des personnages crédibles avec ce qu'il faut de retenue. L'intrigue m'a rappelé le roman cité par Diderot lui même "Tristram Shandy", mais aussi "Don Quichotte" (autre influence) et les livres de Henry James. IL y a aussi ce jeu de narrateur qui est vraiment riche, Diderot en joue à merveille, sans que ça ne devienne jamais lourd ni incompréhensible.

La plume de Diderot est savoureuse. ses descriptions ne sont pas trop envahissantes, ses mots pas trop pédants, tout est compréhensible, tout est clair. Son humour fait mouche systématiquement. L'idée de ne pas avoir de chapitrage m'a semblé casse-gueuleau départ mais très vite j'ai compris que c'était judicieux d'écrire de la sorte ; en effet, cette absence de chapitres permet de vraiment ressentir la continuité de l'histoire et la frustration d'être interrompu (mais une frustration heureuse).

Bref, un roman que je redoutais et qui m'a au final émerveillé pour plein de choses. C'est tellement riche, fort, approfondi.
Fatpooper
10
Écrit par

Créée

le 2 sept. 2014

Critique lue 898 fois

10 j'aime

Fatpooper

Écrit par

Critique lue 898 fois

10

D'autres avis sur Jacques le fataliste

Jacques le fataliste
Eggdoll
5

Je ne suis pas faite pour les romans picaresques.

Pour être tout à fait honnête, je n'ai pas pu le finir. J'en ai lu un bon tiers. Car le problème avec ce livre, c'est qu'on ne sait pas où on va : c'est assumé, évidemment, c'est même le but...

le 8 déc. 2011

18 j'aime

2

Jacques le fataliste
Leo_Mance
9

Diderot, ce génie.

Pour moi et j'imagine pour beaucoup de jeunes Diderot est simplement un mec qui a écrit une Encyclopédie. Un vieux bonhomme à la mine austère dont je n'ai entendu parler qu'au détour d'une ligne sur...

le 6 juin 2019

13 j'aime

6

Jacques le fataliste
Fatpooper
10

Mais qui est le maître ?

J'ai pris mon pied avec cette lecture. Je ne suis pas un grand lecteur de roman, je ne sais donc pas encore exactement ce qui me branche. Mais au vu de ce que j'ai préféré ces derniers temps, je...

le 2 sept. 2014

10 j'aime

Du même critique

Les 8 Salopards
Fatpooper
5

Django in White Hell

Quand je me lance dans un film de plus de 2h20 sans compter le générique de fin, je crains de subir le syndrome de Stockholm cinématographique. En effet, lorsqu'un réalisateur retient en otage son...

le 3 janv. 2016

122 j'aime

35

Strip-Tease
Fatpooper
10

Parfois je ris, mais j'ai envie de pleurer

Quand j'étais gosse, je me souviens que je tombais souvent sur l'émission. Enfin au moins une fois par semaine. Sauf que j'étais p'tit et je m'imaginais une série de docu chiants et misérabilistes...

le 22 févr. 2014

119 j'aime

45

Taxi Driver
Fatpooper
5

Critique de Taxi Driver par Fatpooper

La première fois que j'ai vu ce film, j'avais 17ans et je n'avais pas accroché. C'était trop lent et surtout j'étais déçu que le mowhak de Travis n'apparaisse que 10 mn avant la fin. J'avoue...

le 16 janv. 2011

107 j'aime

55