Ne vous y trompez-pas, c'est loin d'être une pluie de qualités qui va s'abattre sur ce recueil de nouvelles. "Je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part" est une suite de petites histoires dont le style me rappelle le mien il y a de ça quelques années. Soyons d'accord et évitons toute discorde : elle écrit bien mieux que je ne le ferai jamais. Mais quand même ! Je me dis que si elle peut réussir avec ça, nous sommes nombreux à pouvoir espérer. Il n'est pas nécessaire d'avoir ne serait-ce que le dixième du phrasé de Proust ou sonder l'âme humaine comme Virginia Woolf pour s'en sortir dans ce petit milieu, et ça c'est une bonne nouvelle. Disons qu'on y découvre que l'on peut avoir un succès dingue sans trop, trop se fouler le petit orteil. C'est définitivement un livre qui se savoure car il permet de s'identifier. Pour le reste...

Je suis dur ? Très bien, je vous le concède. Le problème de ce style, c'est qu'il est agréable sur un roman, sur une nouvelle d'une centaine de pages ou sur une vie entière. Étalé sur plusieurs récits mis bout à bout, ça dégouline d'une surabondance de phrases incisives, ciselées, cyniques et profondément dans l'ère du temps qui mitraillent toute ébauche de profondeur. En abuser fait tomber à plat toute singularité. La particularité de l'auteur devient commune et tout se ressemble.

Tout sombre alors dans une vacuité incroyable, un truc que j'ai rarement vu dans un livre, un truc parfois pire que Lolita Pille et son Hell dont le champ lexical frôle la fumisterie. "Je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part" est sans cesse entre-deux, entre cette distance effrontée des personnages qui parfois se justifie, parfois non. Si l'écrivain séduit certains de ses lecteurs par sa plume, c'est apparemment sans moi.

Par rapport au fond, on vogue entre l'inintéressant et les sourires, certaines des nouvelles ayant quand même toute mon attention. Permission, par exemple, qui raconte la permission d'un jeune soldat qui rentre chez lui et qui retrouve ses potes et une femme qui aimerait lui offrir la Lune, ou l'inverse. L'absence de consistance des petits moments de vie dans le livre n'est pas préjudiciable quand elle est rattrapée par l'humour et la fraîcheur comme ici. Quand elle prédomine chaque page d'une nouvelle, c'est compliqué...

En bref, une déception. J'aurais aimé être emballé mais ce n'est pas le cas. Ceci dit, si, pour moi, elle ne brille pas par ses talents d'écrivain, je lui reconnais un sens de la formule qui la rend unique et qui attise ma curiosité pour de prochaines expéditions.

Est-ce que tout le monde peut écrire un tel livre ? Non, justement. Et faire croire le contraire, c'est fort...

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le 10 janv. 2015

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EvyNadler

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