Alors, que dire de ce roman ? Première chose, il m’a plutôt surpris. A case de son résumé, je m’attendais à un roman plutôt comique, racontant la bataille d’une jeune enseignante contre une population alcoolique qui va jusqu’à envoyer ses propres enfants en classe avec leur petite dose de jus de pomme hautement alcoolisé dans le cartable.


En vérité, une fois le bouquin commencé, on se rend vite compte que le résumé en question est un peu, beaucoup, carrément, à côté de la plaque. (M’enfin, c’est pas comme si c’était rare…) Alors oui, c’est vrai, il y a bien une sorte d’affrontement entre Marie-Anne et ce village voué au trafic d’alcool. Mais ce n’est qu’un des nombreux éléments de l’histoire qui, elle, se révèle bien plus sombre et complexe.


Prenons Marie-Anne. Elle a bien le rôle de personnage principal, mais c’est un poste qu’elle doit partager avec d’autres. Son cousin, par exemple, flic dont la grande bataille est justement celle du trafic d’alcool et qui, pour cette raison, est devenu la bête noire de la région. Au coude-à-coude avec ces deux là, nous avons aussi Pierre, dit Pierrot, fils du père Soulage, l’un des nombreux trafiquants de la région.


Ajoutons à cela à que l’histoire est loin d’être aussi drôle que l’annonçait le résumé. Il m’est arrivé de rire, oui, c’est vrai, mais l’action, elle, ne tarde pas à devenir beaucoup plus sombre, cruelle même, et stressante. Cette noirceur m’a sauté dessus sans que je ne m’y attende vraiment et c’est certainement pourquoi je suis ressorti aussi déboussolé, quoique satisfait, de ma lecture.


Mais revenons en aux personnages, et en particulier à Pierre. C’est le petit gars de campagne, rude, respecté chez les siens, mais dont les rêves de grandeur ne tardent pas à se retourner contre lui.


Il s’engage dans le transport d’alcool illicite, débarque à Paris et, là, est traité comme, et se donne même l’impression d’être, un petit paysan stupide qui n’a pas sa place ici. Les règles, à Paris, ne sont pas les siennes. Et, bien qu’il ne soit en réalité pas aussi stupide qu’on veuille bien le croire, ces règles ne tardent pas à le mettre en difficulté.


A la différence, Marie-Anne est la petite Parisienne qui débarque dans un village Normand perdu et dont les habitants sont loin d’avoir leur langue dans leur poche. Elle arrive avec sa morale, son éducation et sa vision des choses, et ne tarde pas à se prendre un mur. Car ici, à la façon de Pierre à Paris, la perdante c’est elle.


Quoi d’étonnant, du coup, à ce que ces deux là se rapprochent ? Une relation d’autant plus drôle qu’elle est, elle, passionnément anti alcool, et lui un trafiquant qui n’est pas prêt à partager son point de vue, ni à renoncer à ce qu’il considère comme un héritage familial. Pourtant, plutôt que des éloigner, ces différences ne font que les rapprocher. Pierre devient rapidement l’un des seuls rochers auxquels Marine-Anne peut se raccrocher, et même le seul qui soit valide. A part lui, personne ne semble vraiment capable de l’aider contre les rumeurs et la haine qui ne tardent pas à lui tomber dessus.


Le livre, on l’aura compris, joue beaucoup sur les différences Paris/Province. On se rend même rapidement compte que les durs de Paris, une fois arrivés sur ce terrain qui n’est pas le leur, sont bien vite sinon dépassés, en tout cas mis en échec par une population aux méthodes beaucoup moins subtiles que les leurs, mais qui ont depuis longtemps fait leurs preuves dans le coin.


Tiens, d’ailleurs, pour en revenir au résumé bancal, on y parle de filles noyées. On présente même la chose comme un élément important. Aussi, tout au long de ma lecture, je me suis attendu à ce qu’un moment où à un autre, cet élément resurgisse. En fait, rien du tout ! On a bien une fille noyée au début du bouquin, mais c’est un fait divers que l’on raconte à Anne-Marie et dû uniquement à l’alcoolisme du coin. Rien à voir avec un grand mystère ou, ce qu’on aurait pu penser, une affaire de meurtre. ( Bref, pour lire ce bouquin, autant ne pas s’intéresser du tout au résumé.)


Que dire d’autre ? Peut-être ajouté quelques mots sur les différents personnages. Autant le dire, ils ne sont pas vraiment sympathiques. Ou plutôt, ils ont tous leurs caractères, leurs (gros) défauts et sont souvent très agaçants. En bref, ils sont humains, jusque dans leurs pires travers, même si souvent caricaturaux.


On l’aura compris, j’ai beaucoup apprécié ma lecture !

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8
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le 15 févr. 2016

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