Voilà un livre que j'ai mis un temps fou à lire. Patti Smith a une personnalité extrêmement pragmatique, ce qui rend son discours parfois froid et linéaire. C'est de fait parfois très pesant. Il n'y a rien de romancé, c'est une suite de souvenirs avec des tableaux précis de lieux, de vêtements (c'est un domaine que j'adore néanmoins ça m'a étonné qu'elle insiste autant là-dessus, mais cela reste un intéressant témoignage sur la mode et les codes visuels de l'époque). Ce n'est pas un récit qui vise à faire fonctionner l'imagination à plein régime, tout y est clairement décrit. On y croise une vaste galerie d'illustres personnages qui m'a replongée dans l'époque où j'étais obsédée par Warhol et sa Factory et la Beat Génération. La façon dont tout s'orchestre, dont ces mondes se croisent se font et se défont a une véritable valeur historique. À ce niveau-là, son regard froid et sans fioritures vient compléter intelligemment tous les témoignages de l'époque. Étonnamment, je lui fais bien plus confiance qu'à beaucoup d'autres car on sent que Patti Smith se contrefiche de convenir à l'image qu'on se fait d'elle. J'ai apprécié découvrir le portrait d'une artiste qui a les pieds sur terre, ne se drogue pas, travaille et crée en parallèle, sans jamais céder aux sirènes d'un milieu dans lequel elle ne se reconnaît pas. Elle m'a donné envie de relire de la poésie, mais aussi de conserver plus d'objets atypiques (j'ai déjà mes périodes on ne va pas se mentir), en tous cas d'entretenir mon monde artistique personnel. Son rapport aux objets et aux possessions de manière générale est assez fascinante. Je recommande, mais plus pour l'aspect historique et la réflexion sur ce qu'est le monde artistique.