Je m'étais il y a quelques temps cassé les dents sur "Les absences du capitaine Cook". Je compte toujours y revenir car j'y avait tout de même trouvé une superbe virtuosité dans le maniement des mots et des idées, des logiques délicieusement déviantes. Mais, que je n'ai simplement pas été dans le bon état d'esprit, ou qu'il faille s'isoler radicalement pour trouver la concentration suffisante à la lecture de ces moins de 300 pages (trois mois au couvent : un avant pour trouver la paix, un mois de lecture et un mois pour s'en remettre) j'ai dû abandonner.
On m'a dit: "Mais non ! Il fallait commencer par un autre !" J'ai donc retenté ma chance avec le dernier, "Juste Ciel".
Et on retrouve donc bien cette virtuosité dans "Juste Ciel" mais sous un angle un peu plus "narratif" (avec des guillemets tout de même).
Eric Chevillard ça se lit vite, c'est fluide ça court et ça entraîne, alors même que l'on ressent le besoin de s'attarder sur ces pensées et jeux de l'esprit qui déroulent au fil des pages pour y goûter vraiment.
Il faut donc trouver le rythme entre les réflexions plus ou moins profondes et plus ou moins barrées et les "énumérations catalogues" d'anecdotes et autre démêlages de coïncidences. Le tout par chance est assez juste pour ne pas sembler "too much", trop tiré par les cheveux. Soit que Chevillard soit bon écoutant et/ou bon observateur, même le plus incongru à un petit goût de vécu.
Virtuose donc, et même s'il étale un peu la confiture, on a en filigrane le sentiment que l'auteur aime profondément bien qu'avec un certain cynisme, la diversité grouillante de l'humanité. Alors on lui pardonne.