Il y a des domaines de la littérature que je ne connais pas du tout. Il y en a d’autres, un peu plus nombreux, que je connais un peu mais qui me laissent de marbre ou que je n’aime franchement pas ; je lis quand je suis forcé, et quand je ne le suis pas je ne lis pas. De temps en temps, je ressaie en me disant que la fois d’avant, peut-être avais-je tiré le mauvais cheval, ou n’étais-je pas dans les bonnes conditions ou trop mal luné ou trop jeune ou trop con ou trop fatigué, etc. Je peux éprouver la même chose pour une œuvre particulière. (Par exemple je me suis promis de lire, autour de la cinquantaine si je tiens jusque là, les Mémoires d’outre-tombe, dont le premier volume m’est déjà tombé trois ou autre fois des mains depuis mes années de fac. Après tout, ça a marché avec Stendhal.)
La poésie mystique fait partie de ces domaines. (Je n’y classe pas Léon Bloy : mystique certes, poésie à la rigueur dans la démarche, mais comme c’est écrit à coups de masse d’armes… Bref.) Donc au milieu d’un stand, je tombe sur l’Ami et l’Aimé, je connais de nom l’auteur pour son côté semi-légendaire – et par Harry Potter ! –, le livre est mince, a de la gueule – format à l’italienne, maquette épurée, couverture en papier vergé –, coûtait cent-dix francs à l’époque mais désormais moins cher qu’un exemplaire du Canard enchaîné : le risque est tellement limité que je le prends. Quelques recherches m’apprennent qu’il s’agit d’un choix de cinquante et un versets opéré à partir du Llibre d’amic e amat (« Livre de l’ami et de l’Aimé »), chapitre du Llibre d’Evast e Blanquerna (« Livre d’Evast et Blanquerna »), écrit en 1283 et en catalan.
Je le lis.
Et là : rien. Pas un seul mot qui pète, pas une seule ligne dans laquelle je puisse reconnaître le monde, pas une seule page qui donne envie de s’y attarder. Rien.
Tellement rien que je ne trouve rien d’autre à dire dessus. Ça me met en colère.

Alcofribas
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le 7 juil. 2017

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Alcofribas

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