Bartiméus est bien connu pour sa fameuse trilogie, à ranger en rayon littérature jeunesse aux côtés des Harry Potter et autres Artemis Fowl - avec des thématiques sociales qui arrivent toutefois nettement plus vite dans l’œuvre de Jonathan Stroud , tant son univers peut sembler cynique sous l'apparente malice de son personnage principale.
Écrite entre 2003 et 2005, elle mettait certes classiquement en scène un jeune garçon particulièrement doué apprenant peu à peu le fonctionnement de son monde, mais finalement la couverture était tout entière tirée par Bartiméus, djinn du quatrième niveau, confident de Gilgamesh, favori de Nefertiti, constructeur des murailles d'Uruk, conseiller de Salomon, survivant des plus terribles batailles... oui un esprit à la liste d'exploits aussi longue que son égo et aussi étendue que sa langue acérée. Esclave de magiciens cupides et cruels tout au long de l'histoire humaine, Bartiméus a été le témoin de nombre d'événements exceptionnels. Aussi, malgré l'unité parfaite de la trilogie et la cohérence de son discours envers la tyrannie sociale à double niveau qu'elle décrivait, il était tentant de prolonger l'aventure aux côtés de Bartiméus avec la simple solution de plonger dans son histoire passée.
Nous sommes ainsi projetés dans sa période Salomon... qui initialement ne croise absolument pas Bartiméus, esprit bien trop inférieur pour le côtoyer. La désillusion était attendue tant la saga nous a appris à nous méfier de ce djinn bien bavard, dont la puissance lui a souvent fait défaut malgré une ingéniosité à tout épreuve.
L'écriture para-historique de l’œuvre se montre à la hauteur, replaçant dans l'environnement de ce monde magique des grandes figures et autres empires. La sagesse de Salomon apparaitra d'une manière intéressante au fil de l’œuvre, de même que la décadence égyptienne ou la culture mésopotamienne ancestrale.
Bartiméus reste hilarant, abusant de notes de bas de pages pour bien expliquer au lecteur en quoi il est le meilleur et exempt de tout reproche, alors qu'il ne cesse de se créer des ennuies. Sa haine logique pour les maîtres humains reste tenace, quoiqu'une jeune femme, point magicienne, mais à sa manière servante l'attendrira un peu. Enfin juste il fera le choix de ne pas la bouloter. Faut pas rêver Bartiméus reste un démon coriace, sa rencontre avec Ptolémée qui lui redonnera une toute petite lueur d'espoir en l'humanité restant encore à venir dans quelques siècles vis à vis de l'action du récit.
Bien rythmé, le livre ne promet pas de grandes révélations mais s'applique avec des péripéties toujours bien racontées. Libéré du fardeau d'un héros adolescent/jeune adulte, l'écriture peut se consacrer entièrement à l'aspect aventureux, sans détour ou tergiversation.
Un complément sympathique, malheureusement bien seul à ce jour, alors qu'on pourrait suivre le cocktail d'insolence et de génie de Bartiméus à travers toute l'histoire humaine sans s'en lasser. Pour autant, l’absence de fond limite la porté potentielle d'une telle saga parallèle à la trilogie.