Ceci n'est pas un roman, plutôt une expérience de pensée

Je n'ai pas l'habitude des romans français et c'est la première fois que je lisais un prix Goncourt. Ce bandeau rouge me fait souvent détourner le regard plus qu'autre chose. Je ne recherche pas dans ma lecture des phrases virtuoses qui font la fierté de quelques académiciens poussiéreux qui refusent toute transformation et évolution de la langue.

Rien ne me destinais à acheter ce bouquin donc.

Comme souvent, j'errais sans but dans les rayons livres de la Fnac en me disant qu'en dépensant un peu d'argent j'allais en ressortir un peu plus riche intellectuellement. "L'éveil du Léviathan, The Expanse 1", premier bouquin d'une série interminable de James SA Corey, en main et je me dirige vers l'escalator. C'est à ce moment que je vois ce livre avec sa couverture un peu vieillotte. Je suis alors victime de cette stratégie marketing vieille comme le monde et avec un rictus, je m'en approche, l'attrape et lis le dos de couverture puis la première page. Et là j'ai compris que je tenais dans mes mains quelque chose d'important, tel un gamin pensant tenir une carte menant directement à l'eldorado (un peu chère cette carte, 20€ tout de même ! Son bandeau rouge est d'un plastique rare ?)

C'est peu fréquent, un livre où l'attention est captivée dès le premier chapitre ! Et en plus ce n'était pas une entourloupe ! J'ai lu avec la même vigueur l'ensemble du livre. Il y a un véritable travail de tenir en haleine le lecteur. À cela s'ajoute une belle réflexion sur la réalité et un style riche et varié. On a l'impression de lire plusieurs romans car chaque arc narratif a son propre style. (Bon 20€ c'est pas si mal en fin de compte)

Il y a aussi un petit côté didactique que j'ai trouvé très agréable, peu importe le sujet choisi :

Aussi, dans une critique négative sur Sens Critique d'un certain Philip Marlowe, j'ai pu lire ceci :
"Mais lit-on un prix Goncourt pour avoir des références à Matrix, Black Mirror, Star Trek, The Late Show with Stephen Colbert (!), Facebook, Instagram, Twitter? "

Oui et c'est très bien. Car c'est la culture d'aujourd'hui. L'auteur arrive à aborder cela avec finesse dans ses 327 pages. Et il n'a pas oublié ce qu'était la littérature ! Il faut croire que le Prix Goncourt évolue avec son temps et a su reconnaître ce talent-là. Félicitations à Le Tellier pour avoir su me parler, à moi, jeune de 25 ans qui boudait les romans français jusqu'aujourd'hui.