L’aube sera grandiose est le troisième roman paru d’Anne-Laure Bondoux. Comme elle le disait très bien au Salon du Livre et de la Presse Jeunesse, elle arrive à un âge où elle se demande encore comment parler aux adolescents alors que son adolescence est déjà loin derrière elle… Pari réussi ?
Mon résumé
Vendredi, 22h. Titania, la Fée du suspense, emmène sa fille, Nine, de force dans une cabane perdue au milieu de la forêt. Arrachée à son univers familier, baladée pendant plusieurs heures sur l’autoroute, Nine n’a d’autre choix que d’oublier la fête de l’école qui se déroule sans elle. Bientôt, elle sera happée dans une histoire abracadabrante, pleine de mystère, de peine et d’amour. Une histoire qui lui était jusque là inconnue, cachée. Un lourd passé familial qui refait surface. Titania a dix heures pour conter à sa fille son histoire avant que passé et présent ne se fracasse sur le soleil de l’aube rouge. Et il lui faudra bien plus qu’une « soupe au tapioca et des tartines thon-tomates avec des croquants poivrés » pour y arriver !
Mon avis
« – Octo avait prévu de dîner avec nous, mais il a changé d’avis.
Finalement, il est parti chercher Orion et Rose-Aimée à l’aéroport.
Nine plante sa fourchette dans le premier morceau de viande, tellement
cuit que l’os se détache tout seul. Elle prend le temps d’énumérer
cette liste de prénoms inconnus : Octo, Orion, Rose-Aimée. – Les
personnages principaux de ton histoire, je suppose ? – Exact,
bichette. Sauf que cette fois, ce n’est pas moi qui les ai inventés.
Titania boit une gorgée de vin, puis une deuxième. L’assiette fume
sous son nez. Ses yeux glissent vers la fenêtre. – J’aime pas trop
quand il fait si noir, avoue Nine en suivant son regard. – Ici, c’est
toujours comme ça. On dirait que le jour ne va jamais revenir, dit
Titania. Mais tu verras, l’aube sera grandiose. »
C’est ainsi que tout commence. Autour d’un repas chaud, le noir au dehors, un poêle brûlant, loin des réseaux de communication. Le décor est planté, les personnages installés. Ne reste plus à Titania qu’à inviter sa fille à entrer dans son histoire, en juillet 1970.
Je n’ai pas eu beaucoup de mal à entrer dans ce roman, il commence tranquillement, sans prétention. La question de la transmission est essentielle. Y a t-il un bon moment ? Faut-il attendre, patienter, jusqu’à ce que passé et présent se rencontrent ? Quelle chronologie emprunter ? Titania s’est déjà posée toutes ces questions mais il n’est pas forcément aisé de conter une histoire vécue et les nombreuses interruptions de sa fille nous laissent facilement imaginer la tension qui monte petit à petit dans ce huit-clos intime. Petit à petit nous nous prenons au jeu mais nous restons malgré tout toujours en retrait. Nous ne faisons pas partie de l’histoire, nous restons là, en bordure du lac qui les entoure, sujet absent de cette bulle transparente.
L’histoire en elle-même est bien menée, terriblement page turner comme peuvent dire les américains d’un bon thriller. On a envie de savoir la suite c’est sûr. On a envie de comprendre qui sont Orion, Octo et Rose-Aimée. Petit à petit et jusqu’à la résolution nous nous laissons entraînés dans cette histoire familiale.
Mais je ne suis pas rentrée dedans. Pour moi il manque beaucoup de choses à ce roman. Notamment au niveau des dialogues. Comme ils me semblaient creux par rapport à l’univers poétique, tendre, violent parfois, que Titania tissait autour de sa fille ! Lors de cette rencontre au SLPJ, elle avouait notamment que sa fille, (illustratrice également des petits dessins à l’intérieur des pages) l’avait beaucoup aidée pour les dialogues justement, pour les rendre plus justes. Personnellement je n’ai pas trop vu le résultat, au contraire. Ils manquent de pep’s, de jus, de puissance. Et même si le but de ce roman est de parler de la transmission, d’en faire quelque chose de transgénérationnelle, de faire, enfin, le lien entre « littérature ado » et « Littérature », j’ai eu beaucoup de mal à ne pas le refermer…
Le mot de la fin
L’aube sera grandiose n’aura malheureusement pas su me convaincre. Si l’histoire contée est bien menée et qu’on veut vraiment savoir la suite à la manière d’un page turner, les dialogues restent pour moi froids et distants, manquant singulièrement de pep’s.
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