Avec L'Avenue de verre, Clara Breteau signe une œuvre profondément poétique et intime, où l'autofiction devient un miroir d'une mémoire collective tourmentée. À travers le parcours d'Ana, qui cherche à percer le mystère de son père, un laveur de carreaux d'origine algérienne, le roman tisse des liens subtils entre l'intime et l'universel.
L'écriture de Clara Breteau, d'une délicatesse rare, explore avec une pudeur infinie des thématiques d'une grande complexité : le trauma colonial laissé par la guerre d'Algérie, le poids du racisme, la non-reconnaissance des enfants comme tentative désespérée de protection, et la construction d'identités fragmentées. Le personnage d'Ana découvre tardivement que son père avait une deuxième famille, un choc qui résonne avec la transparence des vitres qu'il nettoyait, métaphore puissante de son désir d'effacer les traces d'une vie marquée par les blessures de l'Histoire.
Le roman est enrichi par des anecdotes historiques fascinantes, comme celle de Robert-Houdin, le magicien envoyé par la France pour asseoir une prétendue supériorité sur les Algériens. Ces récits apportent une profondeur singulière, ancrant l'histoire familiale dans une toile plus large de domination et de résilience.
La poésie du texte éblouit. Les descriptions du sable rouge venu du Sahara, se déposant sur la France comme un écho du passé, ou encore les métaphores filées sur les vitres, les gouttes d'eau et les brisures, confèrent au récit une force visuelle et émotionnelle saisissante. Clara Breteau parvient à transformer l'ordinaire en sublime, à rendre l'invisible visible.
L'Avenue de verre est une œuvre d'une grande force littéraire, qui, tout en dévoilant des blessures personnelles, interpelle par sa portée universelle. Ce premier roman est une réflexion poignante sur la mémoire, les non-dits et les filiations. Une lecture marquante qui restera longtemps gravée dans l'esprit de ceux qui l'auront parcourue.