Me voilà extrait de ce gros livre à la jaquette blanche : L’esprit Bénuchot. M’en voilà extrait, m’en voilà envolé, remonté, dépouillé ! Et maintenant je me prends à essayer d’en écrire quelque chose alors qu’encore je le survole, en esprit, en questions, en doutes. Certainement il est bien tôt mais tant pis, je ne peux pas m’en empêcher. Qu’était-ce donc que ce gros volume à la jaquette blanche que je trimbale depuis un mois et qui fait un bordel infernal dès que j’y touche ?
Je suis passé par divers états de l’esprit lors de ma longue lecture en pointillés. Sans doute n’ai-je pas assez fait preuve aussi de continuité, d’assiduité dans la lecture pour parfois y perdre mon fil, n’y plus comprendre grand chose à moins qu’il soit de ces livres qu’il faut relire. Cela se peut bien ! L’Esprit Bénuchot, c’est du lourd !
Je ne vous raconterais pas l’histoire parce qu’il y en a trop dedans, presqu’autant que dehors. La tentation bénuchote est bien là présente d’une saisie totale de l’ex-istant en in-sistant. Insister c’est donner une chance à la vie de perfuser dans les pages. Ça insiste du dehors vers le dedans et réciproquement ! On sent bien que Jean Jacques, l’auteur, n’a pas vendu son âme mais l’a donnée toute entière à ces personnes, son peuple livre, dans ce monde livre. Je n’ai pas trouvé la clé de voûte que l’on fini toujours par découvrir dans les romans. Mais peut-être bien qu’il me faudrait être parisien tant Paris prête son squelette de rues, de ruelles et de lignes de métro pour les pas agités des différents protagonistes.
Il est question parfois de livre-monde pour qualifier certaines œuvres, j’y ai pensé mais en même temps c’eut été de la maltraitance envers l’Esprit Bénuchot puisqu’il est question ici de bien au-delà du monde. JJR nous entraîne en d’asymétriques figures qui défient le temps et la logique, dans des défilés de miroirs que je n’ose qualifier de quantiques, n’y connaissant que couic en physique. Il nous entraîne dans une sorte de kaléidoscopique métaphore si vous me suivez, ce dont je doute, dont Paris est le personnage central. Je doute même que de moi-même je suive quoi que ce soit. Il faudrait que vous eussiez lut ce livre de toutes les tangentes, pour avoir votre idée, votre trace. Enfin, et encore, puisqu’aussi bien ce livre nous existe-t-il en diffractions subtiles, autrement dit, chacun le sien et plusieurs pour chacun tant il excite en son fort intérieur ce qui s’y retranche.
Je ne le cacherais pas, mon Esprit Bénuchot, lecture première, fût assez chaotique. Comme je l’ai dit il y aurait fallut une certaine assiduité que je n’ai pu, voulu, su, avoir. Je suis distrait, c’est dans mon naturel. Mais il m’est amusant de penser que le livre lui-même est chaotique, pourquoi pas ? La petite Léa nous entraîne dans des méandres qui montent et descendent sans cesse. Dans des ascensions de cols des Pyrénées à n’en plus finir. Le genre que tu crois que t’es arrivé mais t’es jamais arrivé, toujours se dresse une nouvelle montée et parfois même certaines descentes semblent pénibles et des montées légèrement euphorisantes. Une ascension infini d’un col des Pyrénées, à pied hein, pas à vélo, avec l’intégrale des chansons de Léo Ferré dans le casque. Je n’aime pas le vélo. Pour dire aussi que malgré tout, je n’ai pas lâché, j’ai persévéré, espérant un point G. de la lecture, sentant ce point G. partout plié dans chaque page nouvelle tournée. Et puis il y a tant de merveilles, de mots et de phrases émerveillés.
Au fait, je n’ai cessé de penser à Fernand Deligny, vous connaissez pas ? Deligny c’est le nom de famille de la petite Léa. On s’y attache à la petite Léa. Il y a bien une Léa Deligny sur FB mais c’est sans importance, rien à voir. C’est très étonnant ce rapprochement deligniesque, très détonnant même puisque ce Fernand-là, qui n’était pourtant pas dans la physique, ni la quantique ni l’autre puisqu’il était éducateur, a poétisé une théorie autour du cheminement de l’autiste, comment il laisse sa trace, comme il suit son parcours mutique d’une langue marchée. Ça pense avec les pieds comme dit Lacan et c’est bon dieu vrai que les personnages du roman sont des piétons pour l’essentiel de leur randonnée quantique, des gens qui marchent dans les rues, une foule, même si Bénuchot était taximan, comme Ismaël l’Africain. Si je me souviens bien de cette histoire de traces chez Fernand Deligny, c’est une ancienne lecture. Ça devait plaire à JJR d’ailleurs.
Question : peut-on se débarrasser de l’Esprit Bénuchot quand il était déjà là ?

ZutuX
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le 24 juil. 2016

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