Incontournable Juin 2024

Ce petit roman de la collection Deuzio, de la maison Alice, propose le thème récurent du Vivre ensemble, entre deux communautés qui entretiennent des préjugés l'un contre l'autre.

C'est l'été et pour Romane et Simon, l'heure est aux activités estivales. Toutefois, bâtir une cabane au-dehors n'est pas simple. C'était sans compter l'arrivé un peu impromptue d'un jeune garçon de l'âge de Simon, Yoska, dont le campement de sa communauté vient fraichement de s'installer dans le champs voisin. Si les deux enfants sont rapidement impressionnés par les compétences de Yoska, on ne peut pas dire que l'enthousiasme est partagé chez les adultes. Les gitans sont mal perçus, ont craint désormais des vols et il ne faudra pas beaucoup de temps pour que les suspicions et les que les accusations hâtives fusent. Alors quand des vols commencent à être commis, les enfants voient leur amitié compromise.

J'avoue avoir été quelque peu inquiète avec ce roman de la présence d'éléments des premières nations autochtones, car les européens ont beaucoup de mal à ne pas tomber dans la désinformation et les termes inexactes. D'ailleurs, je remarque la surreprésentation de la nation Sioux, une parmi des centaines, mais qui revient comme si tous les autochtones l'étaient. Ils vivaient au sud ouest des états-unis, ils n'étaient donc pas partout et aucunement au Canada. de plus, les "tipis" étaient des maisons portatives qui se dressaient sur elles-même, pas autour des arbres ( il n'y avait d'ailleurs pas d'arbres dans le désert où ils vivaient.

Je constate, non sans amertume, que les gitans, ainsi que les autres communautés nomades de France, sont traitées avec peu d'égards, à l'instar des premières nations de bien des pays. Je ne connais pas suffisamment le sujet pour avoir une opinion étoffée, mais je suis assurément contre les préjugés faciles. Et ces préjugés tenaces ne vont pas tarder, sous l'intolérance et les raccourcis faciles, à devenir de la violence. Et là est le danger, finalement. On voit qu'il suffit de quelques têtes tenaces pour embarquer les autres dans des actions radicales, alors que d'autres, comme la grand-papa des enfants, tergiversent.

Il y a une dimension de ce roman qui m'a interpelée et c'est celle des grand-parents. La grand-mère pense être une enfant gitane adoptée, elle a donc une vision plus nuancée par rapport à cette communauté. Son époux, au contraire, tergiverse entre adhérer aux préjugés ou s'en prémunir. Cela engendre un certain froid entre les deux personnages, et illustre que même les couples de vieille date peuvent avoir des divergences d'opinion. Au final, le grand-papa se range du côté de l'opinion de son épouse, quand le niveau de violence devient critique et que les sentiments haineux prennent le pas de la méfiance. Ce n'est pas toujours simple d'avoir un avis quand on est en parti guidé par de fausses croyances et le grand-papa l'illustre bien.

Les enfants, eux, voient d'abord le potentiel d'amitié avec leur camarade, même s'il est d'une communauté différente. Les enfants ont souvent cette qualité de ne pas faire de cas des différences, surtout les plus abstraites. Ce qu'ils voient en premier c'est le talent de constructeur de Yoska. C'est au contact des préjugés des adultes que s'instaure une certaine méfiance, mais surtout de l'incompréhension.

J'ai bien aimé ce roman, qui nous donne plusieurs nuances grâce à divers point de vue de personnages. Il illustre les dangers de l'intolérance, de la persistance de certaines constructions sociales et les bases du Vivre-ensemble. Ce n'est pas simple de se défaire des préjugés, mais sans dire qu'il ne faut plus en avoir, ce qui est impossible, l'idée est d'apprendre à les revoir et les surpasser. Les préjugés sont des associations hâtives, des opinions préconçues, qui servent à se faire une idée rapide d'une personne ou d'un sujet. Cela dit, ont peut apprendre à les empêcher de se cristalliser et perdurer, car autrement, on restera une société intolérante et campée dans de fausses certitudes. C'est valable dans les deux sens, bien sur.

Et je continue de croire que c'est dans notre jeunesse, en grande partie, que réside la possibilité de faire les choses autrement, si on leur en donne la chance. Comme dans ce roman.

Pour un lectorat intermédiaire du troisième cycle primaire, 10-12 ans+

Shaynning

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