« Un gravier dans la chair d’un homme, et les empires s’écroulent. » Émile Zola, La DébâcleJamais, sans doute, la santé d’un seul individu n’a présidé aussi lourdement au cours de l’histoire de France. Dans un style remarquable, Nicolas Chaudun revient sur les deux mois qui ont vu le Second Empire s’effondrer, alors même que son tournant libéral avait été largement plébiscité par les Français, 104 jours plus tôt. Il souligne avec justesse l’intensité du drame qui s’est noué dans la fournaise d’août 1870, au cœur de laquelle erre, à la recherche de sa mort, « un moribond chevaleresque et désabusé. » Malade, Napoléon III l’est déjà en juillet 1866, lorsque la Prusse de Bismarck et Moltke écrase l’armée autrichienne à Sadowa. À cet instant, l’ordre de Vienne, dans lequel l’empereur a tant bien que mal ramené la France au premier plan, vacille. Il faudrait réagir énergiquement, mater le désordre et les ambitions prussiennes mais Napoléon III en est physiquement incapable : à une anémie s’est rajouté un calcul vésical qui mesurera jusqu’à 6 centimètres de long au moment de sa mort. Trop faible pour être belliqueux alors que se dessine la crise de la succession au trône d’Espagne, l’empereur parvient à forcer la Prusse à retirer la candidature du Prince Léopold de Hohenzollern. Mais le jusqueboutisme de l’Impératrice et des « Mamelouks » entraînent l’Empereur et la France dans la guerre. Le délitement de l’appareil politique et militaire de l’Empire provoque l’une des débâcles les plus retentissantes de l’histoire militaire française. Au cœur de la fournaise de ce mois d'août viennent s’immoler successivement tout ce qu’il pouvait rester de la fine fleur de la cavalerie française héritée du Premier Empire. Le dernier élan des Chasseurs d’Afrique de la Division Margueritte vient clore ce drame, tout entier parcouru des sursauts de panache des unités françaises, des Cuirassiers de Wissembourg et Reichshoffen aux Marsouins et Bigors de la « Division Bleue » à Bazeilles. Le drapeau blanc est hissé sur le fort de Verdun le 2 septembre 1870, alors que déjà Gambetta organise la défense de Paris, et qu'au secours de la Patrie en danger se porte la République.