L'Herbe rouge
7.3
L'Herbe rouge

livre de Boris Vian (1950)

Au début de l'histoire, tous les éléments semblent être réunis pour créer une belle histoire pleine de romantisme et d'amour, mais il ne faut évidemment pas chercher Vian de ce côté là. On entre dans le quotidien de deux couples, Wolf et Lil, Lazuli et Folavril, et tous semblent jeunes, beaux et amoureux. Pourtant, les personnages ne peuvent se dépêtrer de l'ambiance glauque des paysages et de l'environnement (mention spéciale à la description de la femme du maire). Le livre se poursuit en creusant de plus en plus l'ambiguïté entre des situations romantiques, et d'autres complètement macabres. Le malaise continue alors que l'auteur étire sa trame narrative pour arriver dans le vif du sujet : la machine à effacer les souvenirs. La lecture devient alors toujours plus pesante et dérangeante, alors que le tableau initial se décompose et que chaque personnage devient toujours plus sombre et angoissé. Le récit semble dévaler une pente vers toujours plus d'obscurité, entraînant des situations qui oscillent entre comique, grotesque et pathétique, tandis que les épisodes qui pouvaient prêter à sourire au début perdent leur légèreté.

Rien de très agréable dans cette lecture me direz vous, je dois même à ce livre un des cauchemars les plus prégnants depuis un bon bout d'temps. Et pour cause, comme toujours avec l'auteur, ce n'est pas tant le récit en lui-même qui laisse son empreinte, mais les images qu'il invoque avec ses expressions si particulières. Boris Vian invente des mots, des expressions, tourne et retourne la langue française avec une aisance déstabilisante. Tout le génie de son écriture va à la facilité avec laquelle il capte et nous retransmet des éléments qui semblent pourtant indéfinissables : l'attitude d'un personnage, une posture, un sentiment. En quelques mots, grâce à des jeux de consonances ou d'idiomes, Vian parvient à donner de la substance, de la vie à ses personnages. Ce livre est donc passionnant par la richesse des sensations et des sentiments qu'il transmet, bien que cette qualité serve des émotions des plus sordides.

On trouve tout de même quelques rayons de lumière dans le livre. Après la lecture, il restera de Lil sa démarche de salamandre et son oreille nacrée, toute la douceur de Folle pour Lazuli, et une scène vibrante de tendresse et d'émotion qui laisse pourtant une certaine amertume, puisqu'elle a lieu entre Wolf et Folavril.
Ufie
9
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le 25 août 2013

Modifiée

le 26 août 2013

Critique lue 476 fois

Ufie

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