L'Hôtel New Hampshire par Hameçon
John Irving est un enfoiré.
Vous en connaissez beaucoup des auteurs qui vous dégoûtent tellement de leur bouquin que vous ne pouvez plus le lire?
John Irving est un auteur qui n'hésite pas à tuer des personnages principaux en fin de chapitre, en deux mots. Vous lisez. Vous n'êtes pas sûr d'avoir bien compris. Relecture. Mais non, c'est impossible, il ne peut pas avoir fait ça. Troisième lecture. Consternation, énervement. Quatrième lecture: vous avez dû mal comprendre. Sauter un mot de liaison, un verbe, un truc quoi. Cinquième lecture. Déprime. Il a osé. Il a osé tuer ce personnage que vous aimiez tant. C'est alors que c'est difficile de continuer le livre. Vous le laisserez de côté en maudissant son auteur.
Et vous y reviendrez.
C'est sans doute la force de John Irving que de nous investir autant dans des personnages humains, plein de défauts mais incroyablement attachants. C'est aussi une grande force que d'avoir le courage de s'en débarrasser quand il ne le faut pas. John Irving est un auteur que j'apprécie énormément. Il possède une véritable maîtrise du récit. Ses histoires couvrent la vie entière des personnages, abordent des thématiques souvent dures et complexes. Si l'on m'avait résumé les thématiques abordées dans cet opus, je ne suis pas certain que je l'aurai lu. Et pourtant, avec tout le talent qui est le sien, Irving parvient à nous montrer la complexité des situations individuelles et à nous rallier à son point de vue.
L'Hôtel New Hampshire n'est pas le plus connu de ses livres, et ce n'est pas non plus celui qui revient le plus souvent. Pourtant, c'est mon préféré. Il faut dire que pendant la lecture de ce livre, je me suis senti comme un membre à part entière de la famille Berry. Comme eux, j'ai vécu l'ouverture du premier hôtel, j'ai été à Vienne, j'ai apprivoisé un ours, j'ai vécu des drames, j'ai entendu la chanson de Fran... il y a mille trouvailles dans ce livre, des magnifiques bonheurs, et des scènes très dures, des passages vraiment cruels. Mais c'est sans doute là la force d'un grand livre: celui de nous faire vivre une histoire qui n'est pas la notre, de nous embarquer dans des montagnes russes d'émotions.
Depuis ce livre, il me faut du courage pour commencer un autre livre de John Irving. J'en suis pour le moment à 3, et je sens venir l'envie d'en commencer un quatrième. Peut être trouverai-je la force prochainement!