L'île de Statistiques

Je m’attendais à un roman, voilà qui va m’apprendre à ne pas me renseigner sur les œuvres avant de les lire. C’est en effet à un compte-rendu des conditions de vie sur l’île de Sakhaline, lieu reculé aux confins de la Russie que s’adonne ici Tchékhov. L’auteur cherchant avant tout à décrire le plus précisément possible les conditions de vie au bagne de Sakhaline qu’il a observées de près, il ne s’embarrasse pas d’artifices romanesques.

Dans son étude, l’écrivain accumule les informations en tout genre telles qu’études sociologiques, données géographiques, traités de lois etc. Le nombre de données amassées est tel qu’il alourdit considérablement la lecture de l’œuvre. Ces renseignements tendent tous vers la même cause, à savoir montrer que les conditions de vie sur l’île de Sakhaline sont difficiles. Ces détails furent très utiles à l’époque de Tchékhov puisqu’ils ont servi à faire réagir son gouvernement mais aujourd’hui ils ne nous apportent rien. Le lecteur lambda s’imagine très bien à quoi peut ressembler un bagne.

J’ai ainsi retenu très peu de faits, la palme de la lourdeur revenant aux chiffres de toute sortes tels que ceux liés aux recensements, données démographiques, nombre de malades en tout genre, superficie des habitations et des terres cultivées, longueurs, températures, dates et sûrement d’autres que j’ai oublié.

À moins que vous adoriez vraiment la sociologie ou les maths, vous comprendrez donc qu’il y a trop de généralités pour que cela soit marquant. L’auteur a beau nommer les personnes qu’il rencontre, quelques lignes plus loin un nouveau nom apparaît sauvagement faisant instantanément disparaître le précédent.

Je n’aurais pas donné un 6/10 à ce compte-rendu s'il n’avait pas présenté quelques qualités littéraires. Celles-ci se réduisent néanmoins à quelques belles descriptions, trop peu présentes à mon goût. Restent les illustrations fournies par Tchékhov en guise de cadeau de consolation.