Pinar Selek est femme turque ; c'est une sociologue, écologiste, féministe, antimilitariste, libertaire, pro-kurde (mais qui condamne le terrorisme, pacifisme oblige), elle a défendu les minorités sexuelles en Turquie, notamment les transexuelles, ainsi que les enfants des rues et a pris partie pour les kurdes, s'opposant ainsi directement à l'Etat turc. Elle soutient également les arméniens dans leur lutte pour la reconnaissance du génocide par les Turcs.
Elle a également activement participé à la création d'espaces autogérés et de lieux de vie (artistiques notamment) pour les marginaux.
Occasionnellement elle écrit des romans et des livres pour enfants.
Soutenir les kurdes et militer pour l'objection de conscience en Turquie dans les années 80 voilà une véritable provocation pour le régime en place qui ne lui pardonnera jamais. .
Passible de la condamnation à mort, pour un attentat qui finalement n'en était pas un, le verdict sera finalement la prison à vie, prison où elle sera torturée.
Elle a profité d'une mise en liberté conditionnelle pour s'enfuir en Allemagne puis en France où elle vit actuellement mais elle est toujours condamné par la justice turque et tout retour dans son pays est impossible. Sans compter les menaces de mort qui pèsent.
En France elle continue son combat alternatif, notamment contre toute forme de pouvoir et de hiérarchie ; elle participe aux combats féministes, à la revue Silence et à Longo Maï, une communauté autogérée. Avec toujours en vue la convergence de toutes ces luttes.
Dans ce livre, très intéressant et vivant, Guillaume Gamblin, également rédacteur à Silence (revue "non violente, écologiste, alternative"), nous livre une biographie de cette militante hors norme qui malgré les épreuves subies reste d'un optimisme à tout épreuve, avec de nombreux extraits d'entretiens qu'il a eu avec Pinar Selek mais aussi avec des extraits de livres et d'articles.
Ce qui est intéressant c'est que Pinar Selek, qui s'inscrit dans le courant de pensée de Murray Bookchin (connu pour ses essais sur le "municipalisme libertaire"), est une pragmatique aussi n'hésite t-elle pas aussi à égratigner le fonctionnement de certains mouvements féministes français ou de s'interroger sur le mépris des libertaires français vis à vis de la non-violence (ce qui va un peu dans un sens car bien que ne me définissant pas comme non violent je pense que les Black Blocs sont le cancer de l'extrême gauche).
De même si Pinar Selek est sociologue et chercheuse elle conserve un regard critique sur l’université, ses liens avec le pouvoir et la transmission de certaines valeurs plutôt que d’autres.
Ce livre raconte une vie riche, passionnante, au service de causes qui sont aussi les miennes et qui sont toujours d'actualité en Turquie, en France ou ailleurs car il faudra peut-être un jour voir le fonctionnement de notre société différemment, notamment dans le rapport entre les gens, la remise en cause d'une certaine hiérarchisation, la remise en cause d'une certaine façon de consommer et de produire. Pour elle la priorité est d'ailleurs de combattre tous les systèmes et les processus de domination (capitalisme, patriarcat, militarisme, domination de l'Homme sur les autres espèces…)
PS : cela faisait un moment que je voulais rédiger une critique de ce livre, il s'agit ici d'une première ébauche qui sera complétée par la suite