Un livre nécessaire et douloureux.
Ce n'est pas un livre dont j'ai envie de dire que je l'ai aimé.
C'est une sorte de Bible de la Commune, puisque derrière Jacques Vingtras, ancien pion de collège banlieusard qui revient à Paris faire du journalisme et de l'activisme, il y a bien sûr Jules Vallès, et ici le pseudonyme devient très transparent, à mesure que l'on progresse dans le livre.
Le début du livre ne traite pas de la Commune, mais de la manière dont Vingtras retrouve la fibre révolutionnaire et l'appétit pour bouffer du bourgeois. Belle chronique de la fin du Second Empire.
Vallès livre une série de portraîts de grandes figures de la Commune, tant du populo que de l'intellectuel. On sent toute l'effervescence du Paris de Montmartre, et la gouaille populaire de l'auteur donne l'impression d'une société très vivante, très complexe et très injuste. La parole de Vallès ne sait pas être neutre : il faut qu'elle dénonce, qu'elle éreinte ou - plus rarement - qu'elle tresse des lauriers.
En revanche, en-dehors d'une collection de choses vues, il y a peu à glaner pour l'historien, car le récit a beau être chronologique, ce n'est pas la rigueur qu'il vise, mais l'émotion. De mon point de vue, il est donc d'un intérêt réduit, mais je suis un rustre. Le récit sombre parfois dans l'obscurité tant Vallès est allusif à propos d'épisodes d'actualité immédiate qu'aucun lecteur du XXIe siècle ne serait en mesure de déchiffrer si une armada de notes de bas de page ne venait à sa rescousse.
Je déteste cette expression, mais malgré ces défauts, c'est un incontournable. Impossible de penser Tardi, ou même la vivacité de la mémoire de la Commune, sans ce livre.