Retombées

Le Vagabond, c'est un bateau, un trimaran sur lequel vont s'embarquer tant bien que mal un petit groupe (évolutif) d'être humains tentant de fuir les conséquences d'une guerre, non plus "froide" mais bien réelle et nucléaire. Une guerre où l'ennemi est finalement invisible, moins humain encore qu'à l'accoutumée, une guerre où il n'y a pas de vainqueur et où tout le monde est perdant. Une guerre enfin où le tir n'est que le déclencheur avant la souffrance, n'en marque pas la fin ni même le début puisque c'est la retombée qui engendre les pires tragédies.

Quelles sont-elles ces conséquences auxquelles les protagonistes essaient désespéramment d'échapper ? Les pluies de cendres et de poussière radioactives qui rendent malades et finissent par atteindre ceux pensaient avoir échapper au pire, mais aussi les pillages, les réquisitions d’État, les mobilisations forcées pour une guerre qui n'a pas besoin de soldats, les violences physiques et morales qui fleurissent au gré des traumatismes déclenchant les pires comportement psychopathologiques de l'homme.

Mais cette fuite de la violence originelle du conflit et de ses suites les plus proches se heurte très vite à d'autres problématiques en mer. Il y a la piraterie, la faim et la soif, les mutineries, les troubles émotionnels, et lors de brefs retours sur terre les émeutes, les conflits de classe ou ethniques, le rejet...

La lassitude est grande et tout les travers mais aussi parfois les plus beaux aspects de l'être humain sont mis en exergue par l'horreur de la situation présente. Luke Rinehart a su faire de son récit un parfait catalogue de qu'il pourrait se passer dans ce genre de cas, dans une petite communauté d'êtres humains mais aussi dans leur rapport à la société restante qui continue de s'entredéchirer. Il n'oublie pas de donner de l'épaisseur, de l'humanité à presque tous ses personnages, et ce même quand ils peuvent apparaître comme des archétypes sans surprise.

C'est au fond toute la force (et parfois un peu la limite) de L'Odyssée du Vagabond, savoir raconter une histoire qui brasse tout ce que le récit du post apo (qui est ici plus un récit durant l'apocalypse) peut nous dire sur l'être humain, dont la lumière de la guerre a tendance à mettre en évidence sa bestialité autant que son humanité ; le mettre en scène dans une histoire maritime qui accentue encore un peu plus tout cela avec des personnages relativement nombreux mais intéressants sans être pour autant dans le jamais vu.

On est jamais réellement surpris dans le livre de l'auteur de L'homme Dé par ce que l'on lit, ceux que l'on découvre, par les situations ou par les retournements de situation, mais peu importe car tout est là, tout est captivant, c'est plutôt bien écrit et l'on ne décroche jamais.

Une fiction pleine de réalité qui aborde énormément de sujets à travers des personnages auxquels on s'attache.