Destins croisés: une musique discrète et obsédante
Un coup d'oeil sur les différents livres de Brown; ils sont peu nombreux:
http://blogs.mollat.com/litterature/tag/larry-brown/
L'usine à lapins est son dernier livre et est considéré comme son plus abouti. Difficile de décrire cet univers et son écriture… On le compare souvent à Faulkner pour l'intérêt qu'il porte aux laissés-pour-compte et pour ses thématiques, de même que pour son appartenance géographique (Mississipi). Personnellement ça ne m'a pas frappé. Il y a chez lui une apparente économie de moyen, assez trompeuse car derrière celle-ci se cache une subtilité peu commune. Dans ce dernier livre on trouve des animaux (principalement un petit chien), et ceux-ci sont traités avec la même affection distanciée, le même sens aigu de l'observation que les humains. Tous souffrent d'un abandon, même si celui-ci revêt différentes formes. Brown nous entraîne sur un chemin tout en mélancolie et en ironie douce, éloignées de tout pathos, dans ce puzzle de destinées vouées à se croiser. La retenue et la distanciation de sa narration, d'une précision d'entomologiste, rendent d'autant plus surprenantes les absurdités tragiques et parfois violentes, voire grotesques ou franchement comiques qui émaillent ces parcours comme perdus dans une immensité de non-sens. Il n'y a pas de jugement chez Brown. Les êtres se débrouillent avec ce qu'ils ont, pour le meilleur et pour le pire, avec une nette propension à ce que le meilleur se refuse à eux. On rit ou plutôt on sourit beaucoup, et on compatit aussi devant les mésaventures de ces anti-héros, mais notre sympathie grandit aussi; on ne peut pas ne pas nous y attacher. Par petites touches Brown crée en nous une empathie pour le vivant qui n'est pas le moindre de ses mérites. Une vraie découverte pour un auteur bien trop méconnu.
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