Rongé par l'irrésolution, la peur de vieillir, la volupté mêlée à une irrémédiable jalousie, cette trame classique du déséquilibre progressif d'une relation où le désir se révèle définitivement non partagé, évoque non seulement les problèmes de la sexualité et de la jalousie, mais aussi le sujet beaucoup plus poignant des sentiments du jaloux vieillissant. Cruel et lucide, c'est aussi l'occasion pour Philip Roth de pourfendre l'ordre moral et le puritanisme de l'Amérique actuelle. Tout autant érotique que cérébral, ce court roman proche de l'essai est passionnant voir désopilant quand l'orateur emploie des phrases crues pour évoquer sa relation avec la jeune cubaine. Il l'est beaucoup moins quand le récit revient sur la révolution des mœurs des années 60. Adapté au cinéma en 2008, avec Ben Kingsley et Pénélope Cruz, ce livre de Philip Roth a des avis très mitigé et il m'est difficile d'être exigeant avec l'écrivain multi primé dont ce fut ma première lecture. Découverte appréciée et par moment dévorée, LA BETE QUI MEURT m'a ouvert la voie vers ce talentueux écrivain.
"Un nu aux seins opulents, légèrement évasés, pour lequel elle aurait pu poser elle-même. Un nu aux yeux clos, défendu comme elle par sa seule puissance érotique et, comme elle, à la fois primaire et élégant. Un nu mordoré mystérieusement endormi sur un gouffre noir velouté que, dans mon humeur du moment, j'associais à celui de la tombe. Fuselée, ondulante, elle t'attend, la jeune fille, immobile et muette comme la mort."