Bernard se voit « remercié », mis en retraite forcée, lui qui a passé sa vie au service de son travail à calculer, optimiser chaque action pour gagner du temps. Aujourd’hui le voilà chez lui avec plus de temps libre qu’il n’en a jamais connu jusque-là. Que va bien pouvoir faire Bernard? À courir depuis des années après son travail, rien ne l’attend chez lui ou à l’extérieur. Il a bien un ami, une famille, mais tous également occupés, pas de temps à lui consacrer. Il va falloir apprendre à ronger son frein, trouver de nouvelles activités épanouissantes.
Au début très antipathique et asocial, Bernard va s’adoucir et apprendre les petits bonheurs que sont un quotidien tranquille dans un lieu rempli de gens aimés. Lui qui a toujours fuit ses responsabilités familiales n’a aucune échappatoire possible désormais, il va devoir découvrir auprès de ses petits-enfants l’art délicat de l’éducation … Et ce n’est pas gagné au regard du caractère bien trempé de sa descendance !
Très léger, le roman aborde avec douceur les prises de conscience et les changements internes qui animent Bernard. Pourtant sous ces airs mignons, j’ai fini mal à l’aise. Sans l’avoir anticipé, voilà qu’un tournant écologique est pris dans l’ouvrage, me mettant face à ma propre consommation de plastique. Ce monde aujourd’hui survivra après nous, est-ce pollué que nous voulons le léguer ? Au final chacun de nous est une goutte dans l’océan, mais associé ensemble se forme l’océan.
En matière d’écologie et de recyclage, il s’agira toujours d’un petit pas pour l’Homme mais d’un grand pas pour l’humanité. Alors pour sauver la planète, est-il si titanesque d’essayer le zéro déchet ?
J’avais au départ quelques appréhensions à démarrer ce roman car relativement éloigné de mes lectures habituelles. Au final mes préjugés n’avaient pas lieu d’être puisque ce fut une agréable surprise. Remettre sa vie en question, prêcher le faux pour savoir le vrai, il y a une réelle matière psychologique dans ce roman qui en fait sa force. La famille est attachante, les personnages tous plus bienveillants les uns que les autres. Car là aussi l’auteure est douée puisque Bernard au départ est un gros acharné du travail, n’étant jamais présent pour ses proches, préférant fuir ses responsabilités familiales au profit de ses dossiers. De quoi le rendre détestable, d’autant qu’il vit avec l’idée d’être irremplaçable à son poste, un presque Dieu dans l’entreprise pour qui il a travaillé durant plus de trente ans. Prétentieux, arrogant, comment l’aimer ? Malgré tout Aurélie VALOGNES a réussi à ne pas le rendre détestable. Je prenais toujours plaisir à suivre ses aventures, voulant voir où il allait finir. Les petits enfants sont attendrissants, pleins de bonnes intentions et de petites farces faisant sourire régulièrement le lecteur.
Dans les points noirs du livre je noterai certaines scènes un peu « grotesques » à mes yeux. Caricaturales presque, où les astres s’associent à la vie de la famille pour suivre leur nouveaux vœux, ou la prise de conscience relativement facile de Bernard qui change cinquante ans de caractère et de personnalité en quelques mois. Mais ce sont des avis personnels, tout est possible, et je le souhaite bien sûr (voir des gens trouver ce qui est important dans leur vie, ce qui va les rendre heureux pour demain) donc il ne s’agit pas d’une critique acerbe, loin s’en faut.
Une très jolie lecture qui a également (je tiens à le souligner car je trouve cela important) la particularité d’être en bonne partie autobiographique. Certaines péripéties vécues par Bernard ont été subies avant lui par Aurélie VALOGNES. Il faut beaucoup de pudeur et de courage pour avoir ses erreurs, ce qui est tout à son honneur. C’est à force de tomber que nous finissons plus fort, à inlassablement nous relever. Une réelle douceur se dégage des pages de ce roman, et je suis très heureuse d’avoir pu le découvrir.
https://cenquellesalle.wordpress.com/2020/04/05/la-cerise-sur-le-gateau/