Je me permets, avant d'entamer mon retour sur ce recueil de Allan Poe, d'offrir une rapide préface générale et globale à l'œuvre du poète de Baltimore, et qui fera office d'incipit à l'entièreté de mes avis sur chaque nouvelle.
"Parmi les auteurs de la littérature fantastique dont il faut avoir lu au moins un écrit dans son existence, Allan Poe en est un bien singulier. Sa plume, influencée par les récits gothiques digne de Hoffman ou de Irving, aura délivré son lot de perles rares... comme d'écrits parfois lunaires.
Mais s'il faut bien reconnaître une qualité au Poète de Baltimore, c'est qu'il a toujours su concevoir des ambiances sans aucuns équivalents, avec moults détails horrifiques et baroques qui en font les pierres de ses univers.
De par ses incursions littéraires via des essais, des poèmes, des contes et surtout des nouvelles, Allan Poe s'illustre comme l'un des grands noms de la littérature fantastique ainsi que comme une figure majeure du romantisme littéraire.
En avant-gardiste qu'il était, il aura ainsi préfiguré au roman d'aventure avec ses aventures d'Arthur Gordon Pym, qui ne manqueront pas d'inspirer Robert Louis Stevenson pour son Île Au Trésor, ou même encore avec son détective mentaliste Auguste Dupin, bien avant l'arrivée d'un certain Sherlock Holmes...
Traduit par Baudelaire dans nos vertes contrées, le succès de l'auteur aura été une succession de haut et de bas : tantôt plébiscité pour ses succès comme Le Corbeau, mais aussi tantôt critiqué pour sa prose novatrice qui aura fait rugir l'académisme américain.
Malgré tout, Edgar Allan Poe s'illustre comme une source d'inspiration inépuisable pour des auteurs majeurs, tels que H.P Lovecraft ou bien encore Stephen King, et l'ambiance unique de ses récits, allant d'une famille en pleine décadence dans La Chute de la Maison Usher jusqu'à une sombre mélancolie amoureuse dans son sublime Ligeia, auront su marquer les esprits de plusieurs générations."
Dans la plus pure tradition du récit gothique, Allan Poe entame sa nouvelle La Chute de la Maison Usher, parue en 1839, par une description bien singulière: celle de la maison elle-même.
Je ne sais comment cela se fit, — mais, au premier coup d’œil que je jetai sur le bâtiment, un sentiment d’insupportable tristesse pénétra mon âme.
Dans un état de délabrement avancée et striée de part en part de fissures, cette demeure gothique est à l'image de la famille Usher : décadente. Avec un vocabulaire fourni et une personnification allant au delà de toutes logique, Poe démarre son récit par une maison ayant tout les traits d'une vraie personne, et c'est cette sensation d'âme, présente jusque dans le mobilier, qui préfigure déjà le destin tragique de Roderick Usher et de sa sœur affaiblie par une maladie étrange.
Ce n'est donc pas pour rien si cette courte nouvelle d'une dizaine de pages figure parmi les plus célèbres de l'auteur, tant elle synthétise tout le talent d'écriture ainsi que le travail d'ambiance finement effectué, d'une plume acérée et gothique comme on les aime.