Prytannée national militaire, La Flèche, années 60. Dans cet établissement militaire sont formés de la plus tendre enfance jusqu'à l'âge adulte les futurs militaires de la Nation. Pas de simples soldats ou braves matelots mais bien les planqués et gradés de haut vol (ceux qui sont abonnés au Figaro !). Plus sérieusement, c'est aussi ici que le narrateur, en occurrence l'auteur a passé ses dernières années de lycée avant d'intégrer l'X.
Antoine Compagnon nous fait part dans ce livre du mythe qu'il s'est lui-même forgé. Le mythe de sa première année à l'Ecole militaire (la classe de rétho, c'est-à-dire la première). Il nous fait part de ce mythe constitutif de sa vie future. Pourquoi un mythe ? Comme l'auteur le reconnaît volontiers dans la postface, toutes mémoires ou confessions sont transformées par l'expérience future et par le temps. Les évènements se brouillent, s'entremêlent voire se confondent. Tant pis, ce n'est pas l'important car quelque soit la vérité, ce qui compte c'est ce qu'il en reste, ce qui subsiste dans la conscience de l'homme. Les évènements sont donc romancés. Le narrateur avoue de même avoir la capacité de vérifier si ce dont il se souvient s'est bien passé mais ne le fait parce qu'il pense que le souvenir reste plus important que la vérité du moment.
Antoine Compagnon -actuel professeur au prestigieux Collège de France- nous plonge dans l'univers de l'époque avec de multiples références culturelles et politiques. Les années 60 sont en effet une date charnière pour l'armée française. Son rôle se transforme en même temps que la guerre d'Algérie se termine et que la France sort des conflits armés. Dans ce contexte le narrateur apparaît comme un personnage presque parfait (et énervant parfois). Il n'est pas le meilleur mais lui garde conscience de la vie, résiste contre cette force invisible d'absorption de l'homme par l'armée.
En somme, le récit est plaisant et bien mené. L'auteur navigue admirablement entre les époques et les anecdotes sans perdre le fil directeur. L'épilogue est éclairant sur le récit et clôture bien le roman.
Estrobir
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le 10 janv. 2013

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