Une lourde pression reposait sur les épaules de ce quatrième et ultime tome de la saga des Sept Royaumes. Une quinzaine de personnages entourait les épreuves des deux protagonistes, moult rebondissements avaient rythmé le récit, de nombreux complots et trahisons redéfinissaient chacun des enjeux, et la vulnérabilité de l'univers s'amplifiait. La Couronne Ecarlate promettait de clore toutes les intrigues mises en place dans une histoire déjà fort avancée, et le pari semble respecté.


Pour ce quatrième volet, tous les personnages sont connus, aucun n'est introduit même si beaucoup se dévoilent sous un autre jour. Et pourtant, les volontés se divisent au prix d'un démarrage fort lent. Plus consistant que ses prédécesseurs, ce tome prend bien son temps pour préparer une seconde moitié riche en action et en retournements de situation. Raisa ana'Marianna, désormais Reine de son royaume, affronte ses ennemis avec opiniâtreté, que ce soit en face à face ou indirectement, déjoue des complots, défend son territoire tant bien que mal et protège ses amis. Personnage exemplaire quoique parfois unilatéral, elle demeure plus attachante que jamais grâce à tous les dilemmes auxquels elle se confronte. Il en va de même pour Han Alister, et même mieux : après trois tomes, on pensait le connaître, mais il parvient à surprendre, tant le livre joue intelligemment, presque jusqu'au bout, sur son ambiguïté.


Ce duo mémorable aboutit à un bon dénouement malgré sa prévisibilité, et la surprise provient plutôt des personnages secondaires. Socle solide jusqu'alors, ils serviront tantôt de moteurs à l'avancée du récit, tantôt de freins apaisants, tantôt de traîtres insoupçonnés. Sur ce point, je demeure assez mitigé, ce problème survenant lors de la deuxième moitié de l'histoire.


Après une lente montée en puissance, le général Klemath trahit sa patrie, jaloux d'avoir été écarté au profit de la générale Dunedain. En parallèle, Gérard Montaigne lève ses armées et déclare la guerre au royaume encore en deuil de sa précédente dirigeante, tandis que la nouvelle s'efforce de concilier tous les partis. Ces deux événements surviennent au même moment et s'apparentent à des éléments perturbateurs menant l'histoire à son terme. De cela découle une certaine déception vis à vis de certains personnages secondaires. Beaucoup restent fidèles à eux-mêmes en tant qu'éléments du décor, et c'est toujours un plaisir d'appréhender les quelques interventions des gardes (notamment de Talia qui s'avère assez drôle), le cynisme de la doyenne Abelard, la sagesse des matriarches ou encore la sympathie d'Amon Bryne. Mais d'autres personnages suscitent la déception, comme les Bayar.


Les jumeaux Micah et Fiona dévoilent un "double jeu" jusqu'à la fin, fidèles à leur développement des trois premiers tomes. Par contraste, Gavan Bayar, leur père, est ma plus grosse déception de la saga. Il aurait pu être un personnage intéressant, ambitieux manipulateur de l'ombre, mais en fin de compte, il est juste un méchant tellement méchant qu'il laisse mourir sa fille alors que le récit insistait sur sa volonté de rendre sa famille puissante, et il se fait avoir comme un bleu par Han.


Dans cette deuxième partie, la dichotomie s'avère trop prononcée. Les alliances sont formées trop vite, la bataille finale est balayée d'un revers de main et les gentils gagnent grâce à leur volonté de fer, même si c'est pour mieux surprendre le lecteur :


Le rebondissement de fin est en ce sens judicieux et très bien amené. MarcheNuit, assassin de la Reine Marianna, avait comploté dans l'ombre pour une raison pas si manichéenne que cela. Jamais je ne l'avais soupçonné de quoi que ce soit, c'était un rebondissement intelligent et une bonne exploitation de ce personnage dans l'ombre. Et dans la mort, il emporte la guerrière Oiseau de Nuit, trahissant l'idée trop optimiste d'une belle happy end.


Bien que quelques déceptions parsèment l'histoire, c'est une conclusion de taille pour une très bonne saga, qui aura su mêler des personnages attachants (surtout ses deux protagonistes), des dialogues incisifs, des relations intéressantes, un univers fascinant, une ambiance parfois optimiste, parfois épique, et une histoire bien menée. Elle ne sera pas ma saga de fantasy préférée, mais elle est haute dans le classement, c'est certain !

Saidor
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Collection simple de romans fantasy et Liste de livres lus en l'an 2017

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le 8 mai 2017

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