Je suis Michael Connelly depuis les tous débuts de sa célébrité, et les géniales premières aventures de Harry Bosch, et il faut bien avouer que, avec le temps, quelque chose s'est dilué, s'est défait, et qu'on achète aujourd'hui le nouveau Connelly chaque année comme dans un réflexe automatique, quasi pavlovien, Alors qu'il fut une époque où je me fendais d'une somme non négligeable pour lire le livre dès sa sortie, je suis désormais tout à fait satisfait d'en attendre la sortie en "poche".
Bref, face à l'érosion du temps, on sent que Connelly tente quelque chose avec sa "Défense Lincoln", qui traduit une véritable curiosité pour un monde parallèle au sien (celui des policiers et des journalistes de L.A.), un monde côtoyé au quotidien mais finalement haï : celui des avocats de la défense, ces "salopards" qui défont le travail de la police en faisant relâcher des criminels. Et on sent très bien dans la première moitié du livre combien Connelly s'est passionné pour ce fonctionnement à la fois malade (on ne travaille pas sur la culpabilité ou l'innocence de l'accusé, mais sur les vices de forme ou sur la crédibilité du dossier) et nécessaire de la justice démocratique. C'est la partie de "la Défense Lincoln" que j'ai trouvée la plus fascinante, qui voit Connelly oublier les règles les plus élémentaires du thriller (l'intrigue, le suspense) : puis, peu à peu, celles-ci reprennent évidemment le dessus, d'abord excitantes (c'est quand même ce que l'on achète, non ?), puis finalement gentiment routinières, et donc décevantes.
[Critique écrite en 2007]